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suffisamment, pour que sa direction ne puisse être que purement artistique, et personne ne peut mieux prendre cette direction que tous les artistes mêmes qui s’unissent en vue de la réalisation de l’œuvre d’art et qui par une convention se garantissent mutuellement le succès de leur activité : seule la plus complète liberté peut les unir dans leurs efforts vers le but proposé, en faveur duquel ils sont délivrés de l’obligation de la spéculation industrielle ; et ce but est l’Art, qui ne peut être compris que par l’homme libre, non par l’esclave de l’argent.

Le juge de leurs productions sera le public libre. Mais pour rendre celui-ci absolument libre vis-à-vis de l’Art, il faudrait encore faire un pas de plus dans la voie où l’on se serait engagé : le public devrait avoir l’entrée gratuite aux représentations théâtrales. Aussi longtemps que l’argent sera nécessaire à la satisfaction de tous les besoins de la vie, aussi longtemps qu’il ne restera à l’homme sans argent que l’air et peut-être l’eau, cette mesure ne saurait avoir d’autre but que d’enlever aux véritables représentations théâtrales l’apparence de productions contre payement, — cette façon de les envisager tendant à faire méconnaître le caractère des représentations d’art dans le sens le plus abominable : — il appartiendrait à l’État, ou mieux encore à la commu-