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PREMIÈRES RÉPÉTITIONS. — VAUTHROT

plaindre de ma mauvaise volonté. La composition de ces deux scènes m’absorba pendant tout le mois de septembre. C’est alors que commencèrent aussi les répétitions au piano dans le foyer du Grand Opéra.

Le personnel qu’en partie du moins on avait spécialement engagé pour représenter mon œuvre se trouvait rassemblé au complet. Il m’intéressa de connaître la méthode qu’on appliquait à Paris dans l’étude d’un nouvel opéra. Elle est facile à définir : une grande sécheresse jointe à une précision extraordinaire. Le chef du chant, M. Vauthrot, excellait sous ce rapport. N’ayant jamais obtenu de lui la moindre marque d’approbation, j’aurais pu le croire mal disposé envers moi, s’il ne m’avait pas prouvé combien il prenait la chose au sérieux par le soin qu’il mettait dans l’exercice de ses fonctions. Il insista sur différentes corrections importantes à opérer dans le texte afin que le chant produisît plus d’effet. Me basant sur les partitions de Boïeldieu et d’Auber, je m’étais imaginé qu’en français l’accentuation des syllabes muettes était permise en musique et en poésie. Vauthrot m’assura que les compositeurs seuls prenaient cette liberté, mais jamais les bons chanteurs. Aux craintes répétées qu’il exprima sur les longueurs de l’ouvrage, je répliquai que je ne comprenais pas son inquiétude : on ne pouvait pas ennuyer un public habitué à trouver son plaisir dans l’audition de Sémiramis de Rossini, qu’on jouait si souvent alors. Vauthrot réfléchit et me donna raison pour ce qui est de la monotonie du sujet et de la musique ; seulement j’oubliais que dans ces représentations le public ne s’occupe ni de l’action ni