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REINHOLD SOLGER

le terrain intellectuel. Kolatschek me considérait comme écrivain et je fus presque flatté de ce qu’il trouvât qu’une « puissance » telle que moi ne devait pas manquer dans le faisceau d’intelligences sur lequel s’appuierait son entreprise.

De Paris déjà, je lui avais envoyé un article sur l’Art et le Climat. À Zurich, il accepta volontiers quelques extraits assez considérables de mon ouvrage inédit sur l’Opéra et le Drame et me les paya fort convenablement. Cet homme est demeuré pour moi le type unique du rédacteur plein de tact. Il me donna à lire la critique manuscrite qu’un M. Palleske avait faite de mon Œuvre d’art de l’avenir et me déclara qu’il ne l’imprimerait pas sans mon autorisation. C’était une dissertation écrite avec prétention ; de plus, superficielle et inintelligente. Si elle paraissait dans notre Revue, je me voyais obligé d’y répondre par d’interminables et fatigantes explications sur ma véritable théorie. N’ayant aucune envie d’accomplir cette besogne, j’acceptai volontiers la décision de Kolatschek qui rendit le manuscrit à son auteur.

Aux côtés de Kolatschek, je fis la connaissance d’un homme extrêmement intéressant et distingué, Reinhold Solger. Mais sa nature inquiète et aventureuse ne put supporter longtemps la vie mesquine et étroite de Zurich. Solger ne tarda pas à nous quitter et partit pour l’Amérique du Nord où il fit parler de lui par son attitude provocante et ses conférences sur les conditions sociales de l’Europe. Il est regrettable que cet homme de talent n’ait pas produit d’ouvrages importants. Ce que, pendant son court séjour à Zurich, il écrivit pour notre Revue est supé-