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CORNÉLIUS. — LES FRÈRES PORGES

faite beauté et l’amabilité m’impressionnèrent très favorablement. Quant au père, bien que son grand talent de violoniste et sa façon d’exécuter la marche de Rakoczy obtînt toute mon approbation, il me fallut bientôt reconnaître qu’il ne m’avait fait toutes ses grandioses promesses que pour me procurer une satisfaction momentanée et qu’il ne songeait pas à y donner suite. Allant au-devant de son intention, je ne tardai pas à le perdre totalement de vue.

Je me revis donc forcé de m’occuper de projets de concerts. En attendant, je jouissais de mon beau jardin, très agréable par les grandes chaleurs qu’il faisait alors, et, chaque soir, j’entreprenais de longues promenades avec Pohl, mon chien fidèle. Je me rendais de préférence à la laiterie de Saint-Guy où je buvais un lait excellent qui me réconfortait. Mon cercle d’amis se bornait à Cornélius et à Tausig, enfin guéri. Mais celui-ci me fut enlevé pendant assez longtemps en suite des relations qu’il avait nouées avec de riches officiers autrichiens. En compensation, et pour quelque temps, l’aîné des Porges et son frère devinrent mes compagnons d’excursion. En outre, ma nièce Ottilie Brockhaus, de Leipzig, me fit souvent le plaisir de sa visite ; elle était en séjour dans la famille de Henri Laube, avec laquelle sa mère était liée.

Cependant, dès que j’essayais de me remettre sérieusement au travail, l’inquiétude de l’avenir venait me tourmenter. Il ne pouvait être question de retourner en Russie avant Pâques de l’année suivante. Pour mes concerts, je n’avais donc que des villes allemandes en