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ANTHOLOGIE DES POÈTES FRANCAIS

au Figaro avec Alphonse Karr ; il y mit des articles de fantaisie, entre autres Le Paradis des chats. Le roman de Fortunio (publié en volume en 1838 ; il avait paru en feuilleton sous le titre L’Eldorado), où la fantaisie de l’auteur s’est déployée en toute franchise, et où il a glorifié tous ses goûts, se rapporte à ce temps de collaboration.

Enfin, en 1837, il entrait avec Gérard de Nerval à la Presse de Girardin et y commençait sa double carrière de critique d’art et de critique dramatique, carrière imperturbablement poursuivie, de 1843 jusqu’à sa mort, au Moniteur et au Journal Officiel. Cependant La Comédie de la Mort (1838), venait clore fort à propos « par un chef-d’œuvre la période romantique de Théophile Gautier et, on peut le dire, aussi sa jeunesse ». (Émile Bergerat.) L’année suivante, il publiait son premier récit de voyages, Tra los montes, le premier de cette admirable série descriptive qui comprend Zigzags (1845), La Turquie (1846), Italia (1852), Constantinople (1854), Les Vosges (1860), Loin de Paris (1864), Quand on voyage (1865), Voyage en Russie (1866), etc. Parallèlement à ces récits de voyages, il entamait une série de romans et de nouvelles « archéologiques » d’un rendu extraordinaire et d’une érudition très poussée quelquefois : Une Nuit de Cléopâtre (1845), Le Roi Candaule (1847), Aria Marcella (1852) Le Roman de la momie (1856). En 1845, il publiait son recueil de Poésies (Premières Poésies, Albertus, La Comédie de la Mort, Les Intérieurs et les Paysages), qui, « par tout ce qu’il contient, et même avant le brillant appendice des Émaux et Camées, est une œuvre harmonieuse et pleine, un monde des plus variés et une sphère ». (Sainte-Beuve.) Les Émaux et Camées parurent eux-mêmes en 1851. « C’est la dernière et la plus marquée de ses notes poétiques et aussi, de tous ses volumes de vers, celui qui a le plus roussi… Toutes les pièces, moins une, y sont en vers de huit syllabes. Dans ce recueil, la sensibilité se dérobe volontiers sous l’image ou sous l’ironie ; ce n’est pas à dire qu’elle soit absente. » Le poète avait, du reste, précédemment fixé Sa poétique dans l’une de sus plus belles pièces, Le Triomphe de Pétrarque :

Sur l’autel idéal entretenez la flamme.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Comme un vase d’albâtre où l’on cache un flambeau.

Mettez l’idée au fond de la forme sculptée,
Et d’une lampe ardente éclairez le tombeau.

« C’est là son secret, son procédé, dit Sainte-Beuve, et il le met religieusement en pratique. Est-il amoureux, par exemple, souffre-t-il : au lieu de se plaindre, de gémir, de se répandre en larmes et en sanglots, de presser et de tordre son cœur au su et au vu de tous, ce qui lui paraît peu digne, il se contient,