Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t3.djvu/353

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Que le frémissement des roses sous^mes doigts,
Et des boutons, pareils aux gorges découvertes.

Je reviens aujourd’hui, pensif comme naguère,
Rêveur toujours, penchant mon front même rieur,
Mais le cœur plein d’un grand soleil intérieur,
Comme un héros qu’exalte un souvenir de guerre !

Car, ô Maison, pendant qu’ici tu dormais close,
J’ai livré la bataille au destin, j’ai vaincu ;
Tout le rêve qui me hantait, je l’ai vécu ;
Je vais dans la lumière et dans l’apothéose.

Car toutes les fiertés et toutes les ivresses
Ont succédé, mon âme, à tes maux ; tour â tour
J’ai connu tes baisers les plus fougueux, Amour,
Et, Gloire ! la douceur de tes graves caresses.

Les heures de l’angoisse et des larmes sont mortes !
Salut, Maison ! Je suis plein de joie et d’orgueil.
Vous que sur mon ennui, jadis, plus lourd qu’un deuil
Je fermais, — je vous rouvre en chantant, vieilles portes !

(La Beauté de vivre.)

PROMENADE D’AUTOMNE

J’ai marché longuement à travers la campagne,
Sous le soleil, rêveur que son ombre accompagne
Comme la forme pdle, à terre, de son rêve.
L’étang brillait ; je suis descendu sur la grève.
De beaux cygnes nageaient sous les derniers feuillages
Ils traînaient derrière eux, calmes, de blancs sillages
Qui ridaient en s’élargissant l’eau solitaire
Kt semblaient des liens d’argent avec la terre.
J’ai regardé longtemps, assis sous les vieux charmes,
Près du pont, me sentant monter aux yeux les larmes
Que fait venir l’aspect de la beauté parfaite.
Parfois passait, dans l’or du bel automne en fête,
Odeur de la Toussaint funèbre, attristant l’heure
Du tendre souvenir lointain des morts qu’on pleure,
Un monotone et doux parfum de chrysanthème.
— Et soudain j’ai songé que je mourrais moi-même…