Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t3.djvu/398

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Où des corps dépecés que roidit l’agonie,
Des intestins fouillés, écaillés de sanie.
Et des nerfs écrasés sous les ongles vibrants,
S’évade, avec des cris d’angoisse déchirants,
La dernière lueur de ce qui fut un être.

{Le Bouclier d’Arèt.)

AU DIEU QUI S’ÉLOIGNE

Toi dont nous poursuivons, au profond de toi-même,
L’inconnaissable essence et la pure entité,
Que la crainte, la foi, l’amour ou le blasphème
Nomment du même nom auguste et redouté,
O Dieu dont la présence aufSur de nous recule
Dans l’orbe incessamment élargi de nos cieux,
Chaque fois que pour nous s’allume au crépuscule
Un astre nouveau pour nos yeux,

Devrons-nous donc, de ton image qu’on mutile,
Voiler, en fils pieux, le simulacre vain,
Et te rayer d’un mot, comme un terme inutile,
Du problème éternel dont nous voulons la fin ?
Devrons-nous, parvenus aux confins du possible,
Comprendre que notre âme est ton dernier linceul,
Et qu’au jour où ses sens auront vu l’invisible
L’Homme en lui-même sera seul ?

Seul devant la nature et devant sa pensée.
Devant les mondes morts et les cieux à venir,
Et, sous la grande nuit d’astres ensemencée,
Prisonnier de ce tout qui ne peut pas finir ?
Seul dans l’immensité qui toujours renouvelle
Son effort sans limite et sans commencement,
Inconscient désert où rien ne se révèle
Que les formes du mouvement ?

Certe, il regretteia ta sublime chimère,
La sainte volonté dont il cherchait les lois,
L’éternité promise à son être éphémère
Et le songe infini des voyants d’autrefois,
L’intelligence unique où son intelligence