Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t3.djvu/510

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main sur son cœur en regardant la lune ou quelque étoile favorite ; d’évoquer la maison blanche aux volets verts, pour se dire l’annonciateur des fraternités et des bonheurs futurs ? Nous ne le croyons pas. Il faut savoir beaucoup de choses, aux temps présents, pour en apprendre un peu aux hommes, pour en met. tre quelque essence dans ses écrits. Mais qu’il n’y ait ici aucune méprise. Le poème didactique est un non-sens à nos yeux. La poésie reste pour nous l’évangile de l’ineffable qu’elle investit de sa toute-puissance émotionnelle. Elle tend vers toutes les possibilités de l’affirmation, c’est-à-dire vers l’absolu, mais c’est par transcendance et par les voies du sentiment que son charme opère. Et nous voici à notre seconde proposition ; elle découle de la première :

II. —La Poésie, phénomène subjectif, est la volupté de la Connaissance. « Et par Connaissance, nous entendons celle-ci sous toutes ses formes, notion ou prénotion, aspiration, imagination ou intuition. Et qu’est-elle encore, sinon, dans le vouloir et l’effort des hommes, la compréhension, la pénétration, la possession de toutes choses par l’âme et les sens ? Et n’établit-elle pas ainsi la norme même du rêve, rapport mystérieux entre ce qui est nous et ce qui est tout, entre la vie individuelle et la vie universelle ? Or, dans nos recherches, cet enchantement n’est pas moindre de nous apercevoir ici que notre formule est aussi une définition de l’amour. Et nous poursuivons, conséquemment toujours.

III. — La Poésie est infiniment perfectible ; c’est une création perpétuelle,

« Il est bien évident qu’étant en correspondance directe avec notre sensibilité intellectuelle, laquelle se développe de siècle en siècle, sous l’action du savoir de plus en plus étendu, elle ne peut rester stationnaire. Et, cependant, ne vient-on pas répéter que le poète doit sans cesse revenir à l’inspiration première, à la fraîcheur d’âme angélique, à l’ingénuité, à la naïveté touchante des âges d’or, et que, sur toutes choses, il doit écarquiller de grands yeux tout neufs ? Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Il faudrait cependant s’entendre. Jusqu’où, jusques à qui faut-il remonter pour trouver cette fraîcheur d’âme et cette ingénuité charmeresses ? Est-ce jusqu’aux temps de l’homme des cavernes, du déluge ou des croisades ? Ou bien faut-il simplement régresser jusqu’à la mentalité des Iroquois ? Oh ! nous entendons bien la plaisanterie. La gageure tenue est bien bonne. — Il faut régresser jusqu’à l’infantilisme. Aux innocents les mains pleines ! Nous nous en doutions.

« Mais pour nous, qui n’en sommes plus à croire que l’âme