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sa, et s’en retourna avec les cérémonies qu’il étoit venu, à la seule différence prés, qu’à la sortie de la Ville, il fut salué de trois coups de Canon, qui est le plus grand nombre qu’on en tire en ce Païs-là pour quelque cérémonie que ce soit. С’est ainsi que le Commandeur vint enfin à bout d’une affaire embarassante, qui depuis quatre mois lui avoit donné tant d’inquiétude. Il étoit très content d’avoir obtenu les ordres nécessaires pour l’embarquement de ses Provisions, et de se voir par-là en état de partir dès le commencement de la Mousson, et d’arriver en Angleterre, avant qu’on sût en Europe qu’il étoit en chemin pour le retour ; mais ce qui augmentoit encore sa satisfaction, c’étoit d’avoir établi par un exemple éclatant, l’exemption des Vaisseaux du Roi, pour quelques Droits que ce soit, dans les Ports de la Chine.

On commença à porter les Provisions à bord, dès le lendemain, suivant la promesse du Viceroi, et quatre jours après, le Commandeur partit de Canton, pour se rendre à son Vaisseau. Le 7 de Décembre, le Centurion et la Prise levèrent l’ancre et descendirent la Rivière. Ils passèrent le Détroit de Bocca Tigris, le 10, et on remarqua que les Chinois en avoient garni les deux Forts d’autant de Soldats qu’il pouvoit y en tenir, la plupart armés de Piques et de Mousquets à mèche. Ces Garnisons affectèrent de se faire voir des Vaisseaux, et de s’étaler autant qu’il étoit possible, aussi n’étoient-elles destinées qu’à donner à Mr. Anson des idées plus avantageuses des Forces militaires de la Chine, qu’il n’avoit témoigné en avoir jusqu’alors. Pour cet effet, ces Troupes étoient fort bien équipées, et montroient grand nombre de Drapeaux ; il paroissoit de grands monceaux de pierres dans un des Châteaux, et un Soldat d’une grandeur extraordinaire, couvert d’armes magnifiques, se promenoit sur le Parapet, de l’air le plus fier et le plus martial qu’il pût prendre. Cependant quelques-uns des Spectateurs, qui le considéroient du bord du Centurion eurent la malice de soupçonner, que sa belle cuirasse n’étoit que de papier, peint et lustré, de manière à représenter de l’acier poli.

Après avoir conduit nos deux Vaisseaux jusqu’au bas de la Rivière, et au point qu’ils alloient quitter le Territoire de la Chine, j’espère qu’on me permettra, avant de continuer mon récit, de faire encore quelques remarques sur le caractère du Peuple singulier qui habite cet Empire. Je sais qu’on pourroit croire que des observations, faites dans une seule Ville, située à un bout de ce vaste Païs, ne peuvent guère servir à des conséquences générales pour toute la Nation ; cependant comme les af-