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ce qui manquait le plus ; et les nouvellistes avaient beau se battre les flancs, ils ne pouvaient que constater l’insondable mystère qui planait autour de ce meurtre.

La Presse publiait en première page, le plan de la chambre dans laquelle Julia Russe ! avait été assassinée, et contenait l’article suivant :

Un crime étrange et mystérieux a jeté hier la consternation dans la ville de Montréal.

Une femme jeune, belle, appartenant selon toute apparence à la société la plus aristocratique, a été assassinée en plein jour, dans un hôtel situé au centre de la ville, sans que les cris de la victime aient été entendus à travers la faible cloison qui la séparait des chambres voisines.

D’infâmes meurtriers ont pu pénétrer dans sa chambre, en échappant à la surveillance du personnel de l’établissement, accomplir leur sanglante besogne et se retirer ensuite sans attirer l’attention de personne.

C’est par suite d’un pur hasard qu’une lingère, entrant peu de minutes après le crime, dans la chambre No 10, s’est trouvée en face du cadavre de la dame au doigt coupé et qu’elle a immédiatement donné l’alarme.

Malheureusement, il était trop tard !

Nos annales judiciaires ont, une fois de plus, a enregistrer un sombre forfait.

Malgré l’habileté éprouvée de notre police, le crime s’est accompli dans des conditions qui laissent à craindre que l’obscurité le plus impénétrable ne dérobe les meurtriers à la main de la justice.

La victime est une étrangère, qui était inscrite à l’hôtel sous un nom d’emprunt.

Non seulement, elle n’était connue de personne à Montréal, mais il semble qu’elle ait pris un soin tout particulier pour dissimuler son nom et sa personnalité véritable.

Peut-être, en se cachant ainsi, croyait-elle échapper au péril qui menaçait son existence et dépister ses meurtriers.

Tout, en effet, semble faire croire à un drame domestique.

L’argent qu’on a trouvé dans le secrétaire de Julia Russel prouve que le vol n’était pas le mobile du meurtre.

L’enlèvement de tous les papiers de nature à mettre la justice sur la trace du nom et de la résidence de la morte, établit surabondamment que le crime a été commis avec préméditation, et par des hommes d’une habileté consommée, dont la principale préoccupation a été de supprimer toute possibilité d’identifier la victime.

Il n’est pas difficile de conjecturer que le doigt coupé devait porter une bague, sans doute une alliance que les meurtriers ont tenu à