Page:Wanda - La femme au doigt coupé, 1886.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec Julia, personne n’hésitera à reconnaître en elle Mme Crampton, et à lui délivrer le riche héritage qui l’attend.

— Cet excellent ami, Crampton, soupira l’autre homme, il nous a rendu un fier service, en se décidant à rendre Julia veuve, après nous avoir raconté dans l’intimité tous ses petits secrets de famille.

— Et sa sotte de femme, qui se cachait depuis plus de dix ans, et qui avait mieux aimé se séparer de son enfant et renoncer à réclamer la fortune de ses parents, que de s’exposer à voir tomber la fortune ou l’enfant entre les moins crochus de notre camarade, Crampton ! Nous a-t-elle assez servi à souhait avec ses cachotteries !

— Et la jolie petite couturière de la rue St. Constant, reprit l’interlocuteur de Simon. Quelle tête elle a dû faire, la pauvrette, quand elle s’est aperçue que ses papiers avaient été volés ! En voilà une qui aura pu se vanter d’être passée à côté de la fortune !

— Bah ! fit Simon, il lui reste ses dix doigts pour travailler. Cet héritage aurait dérangé son petit train-train. C’est un vrai service que nous lui rendons.

— Mais, j’y songe, reprit vivement Félix, (car tel était le nom du complice de l’homme à la main marquée) as tu mis au moins le doigt en lieu sûr.

— Ne t’inquiète pas de cela, dit Simon ; on connaît les trucs. Il est ficelé, emballé et en route pour un endroit dont on ne revient pas. Je lui ai mis un poids trop lourd. Il ne remontera jamais.

— C’est égal, continua Félix, je ne serai pas tranquille avant que tout ne soit fini. Tu aurais bien pu prendre l’anneau, sans arriver à cette extrémité ! Quant à la mort, tout le monde s’empoisonne, et le suicide aurait été facile à établir. Mais le surplus a fait un fameux vacarme. Pour mon compte, j’avoue que je veux bien voler ; mais le sang, la violence, je n’en suis plus ; et l’idée de me balancer, la corde au cou dans les airs, ne me sourit nullement.