Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/23

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La résurrection est le pardon du Christ à ceux qui l’ont tué, le témoignage qu’en lui faisant tout le mal possible on ne lui a pas fait de mal. Le mal n’est senti que dans un être pur. Mais il n’y est pas du mal. Le mal est extérieur à soi-même. Là où il est il n’est pas senti. Il est senti là où il n’est pas. Le sentiment du mal n’est pas un mal.

Le mal étant la racine du mystère, la douleur est la racine de la connaissance.

La joie de Pâques n’est pas celle qui suit la douleur, la liberté après les chaînes, le rassasiement après la faim, la réunion après la séparation. Elle est la joie qui plane au-dessus de la douleur et l’achève. Le chant lui-même le rend manifeste, dans le grégorien (Salve, festa, dies…) La douleur et la joie sont en équilibre parfait. La douleur est le contraire de la joie ; mais la joie n’est pas le contraire de la douleur.

Celui qui reçoit et transmet la malédiction ne la laisse pas pénétrer au centre de lui-même. Il ne la sent pas. Celui sur qui elle s’arrête, celui qui l’arrête, celui-là, elle pénètre au centre de lui. Il devient malédiction. Il faut être pur pour devenir malédiction.

La plénitude de la joie est nécessaire pour rendre un être si pur qu’il puisse devenir malédiction.

La douleur et la joie alternées purifient un être jusqu’à ce qu’il soit assez pur pour devenir malédiction, et avoir en même temps en lui la plénitude de la douleur, et au-dessus de lui la plénitude de la joie.