Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/48

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Alors on libère en soi de l’énergie par une violence qui en dégrade davantage. Compensation au sens de la thermodynamique, cercle infernal dont on ne peut être délivré que d’en haut.

L’homme a la source de l’énergie morale à l’extérieur, comme de l’énergie physique (nourriture, respiration). Il la trouve généralement, et c’est pourquoi il a l’illusion — comme au physique — que son être porte en soi le principe de sa conservation. La privation seule fait sentir le besoin. Et, en cas de privation, il ne peut pas s’empêcher de se tourner vers n’importe quoi de comestible.

Un seul remède à cela : une chlorophylle permettant de se nourrir de lumière.

Ne pas juger. Toutes les fautes sont égales. Il n’y a qu’une faute : ne pas avoir la capacité de se nourrir de lumière. Car cette capacité étant abolie, toutes les fautes sont possibles.

« Ma nourriture est de faire la volonté de Celui qui m’envole. »

Nul autre bien que cette capacité.

Descendre d’un mouvement où la pesanteur n’a aucune part… La pesanteur fait descendre, l’aile fait monter : quelle aile à la deuxième puissance peut faire descendre sans pesanteur ?

La création est faite du mouvement descendant de la pesanteur, du mouvement ascendant de la grâce et du mouvement descendant de la grâce à la deuxième puissance.