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ESCALADES DANS LES ALPES.

recouverte par un glacier, les moraines doivent y être de la plus petite dimension[1].

Les glaciers eux-mêmes ne fournissent aux moraines qu’un appoint très-minime par l’érosion des rochers qui les supportent, si on le compare aux masses considérables apportées par plusieurs autres sources. Ces énormes amas sont presque entièrement formés par les débris tombés des montagnes qui dominent les glaciers ou des parois qui les bordent et que les eaux détachent et entraînent ; on n’y peut donc trouver qu’une très-petite quantité de matière enlevée aux rochers de son lit par le frottement de la glace.

Si l’on adoptait la théorie opposée et si l’on pouvait prouver que « les glaciers, par leur mouvement naturel, brisent des masses de rochers, les arrachent aux versants et au fond des vallées qu’ils occupent et entraînent avec eux tout ce qui peut être transporté, de manière à former d’énormes accumulations de débris devant leur extrémité inférieure et tout le long de leurs côtés[2], » on devrait en conclure que plus un glacier a d’étendue, plus sa moraine doit être considérable.

Cette théorie ne saurait être adoptée par ceux qui ont étudié eux-mêmes le mode d’action actuel des glaciers. Depuis de Saussure[3] on a toujours répété que les moraines sont principalement formées de débris provenant des rochers ou du sol situés au-dessus de la glace, et non du bassin qu’elle occupe. Mais les savants qui, de nos jours, ont écrit sur les glaciers et sur leur mode d’action dans des temps antérieurs, ont souvent soutenu : — que les moraines représentent l’équivalent des excavations (c’est le terme employé) accomplies par les glaces, ou du moins sont en partie composées de matières excavées par les glaciers ; — que les vastes moraines ont nécessairement été produites par de vastes glaciers ; et qu’une grande extension des glaciers (une période

  1. Les grands glaciers, alimentés par un nombre considérable de bras qui servent d’écoulement à beaucoup de bassins différents, ont rarement de petites moraines.
  2. Atlas of Physical Geography, par Augustus Petermann et le Rev. T. Milner. Les mots imprimés en italique ne sont pas dans l’original.
  3. V. de Saussure, p. 536.