Page:Wilde - Le Portrait de monsieur W. H., trad. Savine, 1906.djvu/263

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tion que l’homme sentimental se permet pour diriger tyranniquement leur vie privée.

Pourquoi ramasseraient-ils avec reconnaissance les croûtes de pain qui tombent de la table du riche ?

Leur place serait à cette même table, et ils commencent à le savoir.

On parle de leur mécontentement. Un homme qui ne serait pas mécontent dans un tel milieu, dans une existence aussi basse, serait une parfaite brute.

Aux yeux de quiconque a lu l’histoire, la désobéissance est une vertu primordiale de l’homme. C’est par la désobéissance que s’est accompli le progrès, par la désobéissance et la révolte.

Parfois on loue les pauvres d’être économes. Mais recommander l’économie aux pauvres, c’est chose à la fois grotesque et insultante. Cela revient à dire à un homme qui meurt de faim : « ne mangez pas tant ». Un travailleur de la ville ou des champs qui pratiquerait l’économie serait un être profondément immoral. On devrait se garder de