Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/105

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la Terre sur le Soleil ; ce dernier est donc tout à fait insignifiant par rapport au premier, ce qui permet de considérer l’effet produit par un soleil rigide sur une planète qu’il déforme incessamment.

Nous avons déjà fait remarquer que le point fondamental de la théorie est la transformation de la quantité de mouvement de rotation d’une planète en quantité de mouvement sur l’orbite. Il suffit donc de calculer, au moins approximativement, les valeurs de ces deux quantités de mouvement pour voir quel accroissement de la vitesse sur l’orbite a pu engendrer le ralentissement de la rotation. Or, ce calcul a montré à M. G. Darwin que la quantité de mouvement de rotation d’une planète quelconque, en y comprenant le mouvement orbital de ses satellites qui en dérive, est toujours très petit par rapport à la quantité de mouvement de la planète sur l’orbite. La plus grande valeur de ce rapport appartient à Jupiter, où la quantité de mouvement interne est 0,00026, tandis que la quantité du mouvement orbital est 13 ou 5 000 fois le premier. D’où il suivrait que si le mouvement de rotation de Jupiter avec ses satellites venait à être détruit par le frottement de la marée solaire, la moyenne distance de Jupiter au Soleil ne serait accrue que de  12500 de sa valeur. Il faudrait donc que la rotation des planètes eut été jadis des milliers de fois plus rapide qu’aujourd’hui, pour que l’effet des marées ait pu accroître notablement les rayons de leurs orbites. Il est vrai que, les planètes étant alors beaucoup plus voisines du Soleil, les marées soulevées par elles sur cet astre auraient ajouté un effet sensible à celui des marées produites par le Soleil sur les planètes. Mais il est peu probable que les masses planétaires aient jamais eu des vitesses de rotation aussi énormes que le voudrait cette hypothèse ; et M. Darwin est conduit à admettre que les planètes, formées de portions détachées d’une masse nébulaire en voie de contraction, sont nées très probablement aux distances mêmes, ou à peu près, où elles se trouvent aujourd’hui. Il fait remarquer d’ailleurs qu’il serait difficile de concilier un élargissement progressif du système planétaire avec l’existence de la loi à laquelle semblent soumises les distances actuelles des planètes au Soleil. La loi de Bode, quelque valeur qu’on veuille lui attribuer, apparaît comme le vestige, un peu déformé sans doute, de l’influence des lois qui ont déterminé les époques successives d’instabilité de la nébuleuse en mouvement de rotation et de con-