Page:Wyzewa - Un miracle, paru dans Le Figaro, 07, 08 et 09 mai 1890.djvu/9

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

lui avaient dit des jeunes filles, qu’une mélodie suffisait à leur faire oublier tous les chagrins, inondant leur cœur et leur chair de chaudes sensations ? Elle essaya de jouer une valse qu’elle savait par cœur, elle se contraignit à jouer avec une rapidité folle ; malgré tout, elle s’ennuyait et elle ferma le piano.

Sa mère venait de découvrir, dans le Scotsman, un article nécrologique sur un avocat, ami de M. Mac-Gibbon. « Écoutez, Kate ! » – et elle dit écouter, et par instants répondre « Oui », ou faire quelque geste d’attention, lorsque sa mère lui signalait une phrase ingénieuse. Elle éprouvait maintenant une envie de courir à la fenêtre, de voir si sa sœur et le jeune homme étaient loin : elle se demandait s’ils allaient bientôt débarquer à Lochhead, où ils devaient s’arrêter pour rendre visite aux trois vieilles misses Mac Lane. « Que lui dit-elle, pendant qu’ils rament, assis en face l’un de l’autre, les yeux dans les yeux ? »

Un moment elle s’imagina que c’était pour parler d’elle que le jeune homme avait voulu être seul avec Nelly, pour la consulter sur ce qu’elle avait pu entrevoir