Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/226

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pas davantage et me décidai à prendre un guide le lendemain matin pour visiter les restes de ces travaux, puisque je ne pouvais voir leur auteur. La mention de sa mort en état d’insolvabilité me fit beaucoup de peine ; c’était un mauvais commentaire à son livre, et je prévoyais que quiconque je rencontrerais à Tourbilly n’aurait que des risées pour une agriculture qui avait ruiné le domaine où on l’avait mise en pratique. — 30 milles.

Le 29. — Ce matin, j’ai exécuté mon projet. Le paysan qui me servait de guide étant doué de deux bonnes jambes, il me conduisit à travers les bruyères dont le marquis parle dans son Mémoire. Elles paraissent sans bornes, et l’on me dit que je pourrais voyager bien des jours sans voir autre chose ; quel champ d’amélioration pour créer, non pas pour perdre des domaines. À la fin, nous arrivâmes à Tourbilly, pauvre hameau composé de quelques maisons éparses dans une vallée entre deux hauteurs encore incultes ou couvertes de bruyères. Le château est au milieu ; on y arrive par de belles avenues de peupliers. Je ne puis décrire aisément la curiosité inquiète que je ressentais en visitant chaque coin de la propriété : il n’y avait pas une baie, un arbre, un buisson, qui n’eût pour moi de l’intérêt. Longtemps avant d’avoir pu me procurer l’original du Mémoire sur les défrichements, j’en avais lu la traduction dans l’Agriculture de M. Mill, dont c’était, à mon avis, la partie la plus intéressante, et m’étais résolu, si jamais j’allais en France, de visiter des travaux dont la description m’avait fait tant de plaisir. Je n’avais ni lettre ni recommandation pour le propriétaire actuel, le marquis de Galway. En conséquence, je lui exposai simplement