Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/345

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parle de choses que ne connaissent pas ceux qui la répandent, on est sûr de la trouver exagérée : les irrigations se réduisent à une pente de montagne convertie par l’eau en prairie passable, mais à la grosse et sans entente de l’affaire. Celles de la vallée, entre Riom et Montferrand, sont bien au-dessus. Les sources sont abondantes et curieuses : elles sortent, ou plutôt jaillissent en sortant des rochers en quatre ou cinq courants dont chacun peut faire tourner un moulin ; c’est dans une caverne, un peu plus bas que le village, qu’elles se trouvent. Il y en a beaucoup d’autres une demi-lieue plus haut ; au fait, elles sont si nombreuses qu’il n’y a pas de rocher qui en soit dépourvu. Je m’aperçus au village que mon guide ne connaissait pas du tout le pays, je pris donc une femme pour m’indiquer les sources d’en haut : à notre retour elle fut arrêtée par un soldat de la garde bourgeoise (car ce misérable village, lui-même, a sa milice nationale), pour s’être faite, sans permission, le guide d’un étranger. On la conduisit à un monceau de pierres, appelé le château : quant à moi, on me dit qu’on n’avait que faire de moi ; cette femme seulement devait recevoir une leçon qui lui enseignât la prudence à l’avenir. Comme la pauvre diablesse se trouvait dans l’embarras à cause de ma personne, je me décidai sur-le-champ à la suivre pour la faire relâcher, en attestant son innocence. Toute la populace du village nous accompagna, ainsi que les enfants de cette femme, qui pleuraient de crainte que leur mère ne fût emprisonnée. Arrivés au château, on nous fit attendre un peu, puis on nous introduisit dans la salle où se tenait le conseil municipal. On entendit l’accusation : tous furent d’accord que, dans des temps aussi dangereux, lorsque tout le monde savait qu’une personne du rang et du pouvoir de la reine conspirait