Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/348

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

volubilité ne provient que de l’ignorance ? Enfin, que l’on s’explique le fait comme on voudra, pour moi il est constant et n’admet pas le moindre doute.

Le 14. — Issoire. Le pays est rendu pittoresque par la quantité de montagnes coniques qui s’élèvent de tous les côtés. Quelques-unes sont couronnées de villes, sur d’autres s’élèvent des forteresses romaines ; l’idée que tout cela est le produit d’un feu souterrain, quoique remontant à des âges bien trop éloignés pour qu’il en reste aucun témoignage que l’œuvre elle-même, cette idée tient constamment l’attention en éveil. M. de l’Arbre m’a donné une lettre pour M. de Brès, docteur en médecine à Issoire ; je trouvai celui-ci au milieu de ses concitoyens réunis à l’Hôtel de ville, pour entendre la lecture d’un journal. Il me conduisit au fond de la salle et me fit asseoir près de lui : le sujet de la lecture était la suppression des ordres monastiques et la conversion des dîmes. Je remarquai que les auditeurs, parmi lesquels il y en avait de la plus basse classe, étaient très attentifs ; tous paraissaient approuver ce qu’on avait dit des dîmes et des moines. M. de Brès, qui est un homme de grand sens, m’emmena à sa ferme, à demi-lieue de la ville, sur un terrain d’une richesse admirable ; comme toutes les autres fermes, celle-ci est aux mains d’un métayer. Soupé ensuite chez lui en bonne compagnie ; la discussion politique a été fort animée. On parlait des nouvelles du jour, on semblait disposé à approuver chaleureusement les dernières mesures ; je soutins que l’assemblée ne suivait aucun plan régulier ; elle avait la rage de la destruction sans le goût qui fait édifier de nouveau : si elle continuait ainsi, détruisant tout et n’établissant rien, elle jetterait à la fin le royaume dans une telle confusion,