Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/354

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femme vinrent me trouver et semblèrent désapprouver mes projets par les difficultés qu’ils élevaient à chaque moment ; comme je les avais questionnés sur le prix des vivres et d’autres choses, je suppose qu’ils me regardaient comme suspect, et me crurent de mauvaises intentions. Je tins bon cependant ; on me dit alors qu’il fallait prendre deux mules. « Très bien, ayez-en deux ! » Ils revinrent ; il n’y avait pas d’homme pour conduire ; à cela venaient s’ajouter de nouvelles expressions de surprise sur mon désir de voir des montagnes qui ne me regardaient en rien. Enfin, après avoir fait des difficultés à tout ce que je disais, ils me déclarèrent tout uniment que je n’aurais ni mule ni guide, et d’un air à ne me laisser aucun espoir. Environ une heure après, vint un messager très poli du marquis de Deblou, seigneur de la paroisse, qui, ayant su qu’il y avait à l’auberge un Anglais très désireux de visiter les volcans, me proposait de faire une promenade avec moi. J’acceptai son offre avec empressement, et prenant sur-le-champ la direction de sa demeure, je le rencontrai en chemin. Je lui expliquai mes motifs et les difficultés que j’avais rencontrées ; il me dit alors que mes questions avaient inspiré les soupçons les plus absurdes aux gens du pays, et que les temps étaient si critiques, qu’il me conseillait de m’abstenir de toute excursion hors de la grande route à moins qu’on ne montrât de l’empressement à me satisfaire en cela. Dans un autre moment, il eût été heureux de me conduire lui-même ; mais à présent, on ne saurait avoir trop de prudence. Impossible de résister à de telles raisons ; mais quelle mortification de laisser sans les voir les traces volcaniques les plus curieuses du pays ! car dans le dessin de M. de Saint-Fond, les contours du cratère sont aussi distincts que si la lave coulait