Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/75

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’il tient de sa charge de grand maître de la garde-robe, une des principales de la cour de France. Là, je le trouvai au milieu d’un cercle de gentils-hommes, entre autres le duc de Larochefoucauld, célèbre par son goût pour l’histoire naturelle ; je lui fus présenté, car il se rend à Bagnères-de-Luchon, où j’aurai l’honneur d’être de sa compagnie.

La cérémonie du jour était causée par le cordon bleu dont le roi devait donner l’investiture au duc de Berri, fils du comte d’Artois. La chapelle de la reine y chanta, mais l’effet fut bien mince. Pendant le service, le roi était assis entre ses deux frères, et semblait, par sa tenue et son inattention, regretter de n’être pas à la chasse. Il eût tout aussi bien fait que de s’entendre prêter un serment féodal, ou quelque autre sottise de ce genre, par un enfant de dix ans. À la vue de tant de pompeuses vanités, j’imaginai que c’était là le Dauphin, et m’en informai d’une dame fort à la mode, assise près de moi, ce qui la fit me rire au nez, comme si j’avais été coupable de la bêtise la plus signalée ; rien ne pouvait être plus offensant ; car ses efforts pour se retenir ne marquaient que mieux l’expression de son visage. Je m’adressai à M. de Larochefoucauld afin de savoir quelle grosse absurdité m’était échappée à mon insu ; c’était le croirez-vous ?) parce que le Dauphin, comme tout le monde le sait en France, reçoit le cordon bleu en naissant.

Était-il si impardonnable à un étranger d’ignorer une chose d’autant d’importance dans l’histoire du pays que la bavette bleue donnée à un marmot au lieu d’une bavette blanche ?

Après cette cérémonie, le roi et les chevaliers se dirigèrent en procession vers un petit appartement où le roi dîna ; ils saluèrent la reine en passant. Il parut y avoir