Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/19

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— Prennent un s ? Non, monsieur, interrompit-elle, énervée de ce manque de confiance.

H… sourit. Il était dans la force épaisse de la soixantaine, très rive droite, très dix-huitième, (dix-huitième arrondissement), sentant l’Académie sans épée, l’avant-guerre sans souci, la gloire sans tambour ni trompette. La sienne datait de l’affaire Dreyfus. Elle était contemporaine de Cyrano de Bergerac, des chignons en cimier, des lampes modern style, des portiques du métro, des premiers ministères panachés et d’un radicalisme sans panache. Elle était née sous le soleil de Fachoda, sous les Évangiles de Zola, sous l’Aurore de Clemenceau, sous le Crépuscule de la Rose-Croix, sous le signe de l’Hymne russe et de la conférence de la Haye. Elle était de l’époque où l’on baptisait les petites filles sous le nom d’Olga et où les grands garçons de vingt-cinq ans ignoraient les apothéoses littéraires. Bien surpris quand son premier roman s’était vendu à trois mille exemplaires, salué par les articles d’une critique munificente et prodigue qui n’avait pas encore connu de conseils judiciaires.

Sa course dans la carrière s’était poursuivie régulièrement, épousant les grands accidents du terrain historique, l’enfantement du jeune siècle, qui venait au monde comme un Arlequin, né