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Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/57

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qu’il portait plus secrètement encore : une liaison indigne, un abandon d’enfant et surtout, ce qui le ruinera davantage dans l’enthousiasme national, cette faiblesse qu’il eut vis-à-vis de l’argent, une petitesse, un ridicule. Le bruit qu’il déchaînera en s’écroulant, ce tonnerre, c’est toi qui l’auras lancé. Mais, tu ne feras pas ça, Mandrier, parce qu’alors, c’est toi qui duperais les hommes. Là où il y eut un génie, un idéal, un modèle, à la même place, tu introduirais un mannequin mesquin et grimaçant. Tu mentirais, mon vieux, car tu sais bien, au fond, toi qui le connaissais, qui l’as vu trois cent soixante-cinq fois par an, le matin, qu’il fit pluie ou soleil, que lui fût malade ou bien portant, te tendre la main avec ce sourire égal des grands êtres, tu sais bien — et il n’y a pas de petits côtés qui tiennent là devant — qu’il était supérieur. Tu l’as vu chercher dans les Pères de l’Église, chercher dans Platon, chercher dans Moïse, aspirer la vérité avec cette candeur animale, cette sincérité religieuse du cheval à l’abreuvoir. Tu l’as vu à table, qui ne cessait de parler en mangeant, comme les nobles. Tu te souviens quel trait c’était de lui que cette formule familière qu’il avait sans cesse aux lèvres : « Je crois que ce serait mieux d’agir ainsi », tant il était dominé par l’idée du meilleur. Tu l’as connu sans vanité,