Page:Zola - Fécondité.djvu/520

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Lorsque Mathieu commença ses recherches discrètes, la première idée qu’il eut, même avant de consulter Beauchêne, fut de s’adresser directement à la maison des Enfants-Assistés. Si l’enfant était mort, comme il le pensait, cela enterrait l’affaire. Il se rappelait heureusement les moindres détails, le double prénom Alexandre-Honoré, la date exacte du dépôt, tous les petits faits du jour où il avait accompagné la Couteau en fiacre. Et, quand il eut été reçu par le directeur de la maison, qu’il lui eut expliqué le motif vrai de son enquête, en se nommant, il fut surpris de la prompte et nette réponse : Alexandre-Honoré, mis en nourrice à Rougemont, chez la femme Loiseau, après avoir gardé les vaches, puis essayé l’état de serrurier, était depuis trois mois en apprentissage chez un charron, le sieur Montoir, à Saint-Pierre, un hameau voisin. L’enfant vivait, avait quinze ans, et ce fut tout, il ne put avoir aucun renseignement autre, ni sur les conditions physiques, ni sur la moralité.

Dans la rue, Mathieu, un peu étourdi, se souvint que la Couteau lui avait dit, en effet, d’après une infirmière, que l’enfant allait être envoyé à Rougemont. Toujours, il l’y avait vu mort, emporté par la rafale qui décimait les nouveau-nés, couché dans le muet cimetière de village que pavaient les petits Parisiens. Le retrouver ainsi, sauvé du massacre, était une surprise de la destinée, une vague angoisse au cœur, comme une crainte de pires