Page:Zola - Fécondité.djvu/547

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Rose, dans l’allégresse du double mariage qui allait être comme le sacre glorieux de Chantebled, avait eu l’idée d’y réunir toute la famille, un dimanche, dix jours avant la cérémonie. Dès le matin, elle irait avec son fiancé, suivie de la famille entière, chercher à la gare de Janville l’autre couple, Ambroise et Andrée, qu’on amènerait triomphalement à la ferme, pour y déjeuner. Ce serait une répétition, expliquait-elle en riant de son beau rire : on s’entendrait, on arrêterait ensemble le programme du grand jour. Et elle était si heureuse de son idée, et elle se promettait une telle joie de cette première fête, que Mathieu et Marianne, qui l’adoraient, consentirent.

Ce mariage de Rose achevait le bonheur de la maison, telle que la floraison suprême d’une longue prospérité. Elle était la plus jolie des filles, les cheveux bruns, le teint doré, avec sa figure ronde et fraîche, ses yeux de gaieté, sa bouche de charme. Et d’une douceur toujours égale, d’un rire toujours sonnant, l’âme même de cette grande ferme vivante, dont elle semblait être la bonne fée, la chanson victorieuse. Mais le choix de son fiancé avait surtout montré toute la raison, toute l’énergique tendresse de son cœur, sous cette continuelle belle humeur qui la faisait chanter du matin au soir. Depuis huit ans, Mathieu avait engagé le fils d’un petit cultivateur voisin, Frédéric Berthaud, un solide garçon, qui s’était passionné pour les travaux créateurs de Chantebled, s’y instruisant, y montrant