Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/143

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chevalets boiteux. Elle m’apparaît douce & riante, lorsque je regarde ma chambre d’aujourd’hui & que j’aperçois, au milieu, se dresser Laurence qui m’effraye & m’attire.

Plus tard, le grand air nous enivra. Nous eûmes la saine débauche des champs & des longues courses. Ce fut une folie, un emportement. On brisa les cornues, on oublia le raisin, on ferma la porte du laboratoire. Le matin, nous partions avant le jour. Je venais sous vos fenêtres vous appeler en pleine nuit, & nous nous hâtions de sortir de la ville, carnier au dos, fusil au bras. Je ne sais à quel gibier nous chassions ; nous allions, flânant dans la rosée, courant au milieu des hautes herbes qui se courbaient avec des bruits secs & pressés, nous vautrant dans la campagne comme de jeunes chevaux échappés. Le carnier était vide au retour, mais la pensée était pleine & le cœur aussi.

Quelle contrée puissante, âpre & douce