Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/194

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& âpre, il ouvrait merveilleusement l’appétit. Laurence dévorait ; je ne lui connaissais pas ces belles dents blanches, affamées, mordant au pain avec des éclats de rire. Jamais je n’ai mangé si volontiers. Je me sentais léger d’âme & de corps, je me surprenais à me croire encore écolier, aux jours où nous allions nous baigner dans la petite rivière & dîner sur les herbes de la rive. J’aimais ce linge blanc sur la table noire, ces ténèbres des feuillages, ces fourchettes de fer, ces grossières faïences ; je regardais Laurence, je vivais largement, dans la plénitude de mes sensations, jouissant avec volupté de tout ce qui m’entourait.

Au dessert, le chef de cuisine est venu recevoir nos félicitations. C’est un grand vieillard, un peu voûté, tout de blanc vêtu. Il se coiffe d’un bonnet de coton & porte, ramenées sur les tempes, deux touffes de cheveux grisonnants & frisés, parmi lesquels s’oublient quelques pa-