Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/223

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans l’affection. La souffrance de la chair & la souffrance du cœur s’unissent en une sensation d’une accablante pesanteur, inexorable, m’écrasant toujours. Et moi, je perds le souffle, m’abandonnant, descendant de plus en plus dans mes soupçons, agrandissant ma blessure, m’évanouissant à la vie, ne vivant que de la pensée qui me ronge.

Si je souffrais moins, je voudrais savoir de quoi est faite ma souffrance. J’aurais un âpre plaisir à interroger mon corps, à questionner ma tendresse. Je suis curieux de voir le fond de mes désespoirs. Sans doute, il y a là les mille méchantes choses de l’amour, l’égoïsme & l’amour-propre, la lâcheté & les passions mauvaises ; il y a la révolte des sens, les vanités de l’intelligence. Cette femme qui s’en va, lasse de mes caresses, & qui me préfère un autre homme, me blesse dans tout mon être ; elle me dédaigne, elle déclare qu’elle a trouvé un amour plus doux, plus pur que le mien.