Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/322

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tions, au milieu de mes larmes ; j’aurais usé mon trop d’amour dans la prière, au lieu de ne pouvoir le donner & de le sentir m’étouffer. Je m’étais abandonné, parce que je ne croyais qu’en moi & que j’avais perdu toute ma force. Je ne regrette pas d’obéir à ma raison, de vivre libre, n’ayant que le respect du vrai & du juste. Seulement, lorsque la fièvre me prend, lorsque je frissonne de faiblesse, j’ai peur, je deviens enfant ; je voudrais être sous le coup d’une fatalité divine, m’effacer, laisser Dieu agir en moi & pour moi.

Et je songeais à Marie, me demandant où était son être à cette heure. Dans la grande nature, sans doute. Je faisais ce rêve que chaque âme va au grand tout, que l’humanité morte n’est qu’un souffle immense, un seul esprit. Sur la terre, nous sommes séparés, nous nous ignorons, nous pleurons de ne pouvoir nous réunir ; au-delà de la vie, il y a pénétration complète, mariage de tous avec tous, amour