Page:Zola - Travail.djvu/219

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« Josine ! Josine ! … Au revoir, Josine !

— Merci, merci, monsieur Luc ! »

Il ne la distinguait plus, elle avait disparu ; mais il entendait toujours son remerciement de gratitude et de joie, ce gazouillis d’oiseau que le vent du soir apportait ; et cela était d’un charme infini, tout son cœur pénétré, enchanté.

Luc resta longtemps à la fenêtre, dans un ravissement, dans un espoir sans bornes. Entre l’Abîme où haletait la sourde respiration du travail maudit, et la Guerdache dont le parc faisait une tache noire, au milieu de la plaine rase de la Roumagne, il regardait le vieux Beauclair, le faubourg ouvrier aux masures branlantes, à demi pourries dormant sous l’écrasement de sa misère et souffrance. C’était là le cloaque qu’il voulait assainir, l’antique geôle du salariat qu’il s’agissait de raser, avec ses iniquités et ses cruautés exécrables, pour guérir l’humanité de l’empoisonnement séculaire. Et il rebâtissait à cette même place, il évoquait la ville future, la Cité de vérité, de justice et de bonheur, dont il voyait déjà les maisons blanches rire parmi les verdures, libres et fraternelles, sous un grand soleil d’allégresse.

Mais, tout d’un coup, l’horizon entier s’illumina, une flambée rose éclaira les toitures de Beauclair, le promontoire des monts Bleuses, la campagne immense. C’était une coulée du haut fourneau de la Crêcherie, que Luc avait d’abord prise pour une aurore. Et ce n’était pas une aurore, c’était plutôt un coucher d’astre, le vieux Vulcain, torturé à son enclume, qui jetait sa dernière flamme. Le travail ne serait plus que la santé et la joie, demain allait naître.