Page:Zola - Travail.djvu/395

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même mieux  ; et, si ce n’est pas nous, ce seront nos enfants, les chers petits que nous élevons pour cela… Ayez confiance, Bonnaire, dites-vous que désormais l’avenir est à nous, puisque notre ville pousse, pousse toujours.  »

Et, d’un geste large, il montrait, parmi les jeunes arbres, les toits des maisons aux faïences de couleur, si gaies sous le soleil couchant. Et il revenait toujours à ces vivantes maisons, que son souffle semblait faire sortir de terre et qu’il voyait réellement en marche, telle qu’une armée pacifique, partie pour ensemencer l’avenir sur les décombres du vieux Beauclair et de l’Abîme.

Mais si, à la Crêcherie, le peuple industriel avait triomphé seul il y aurait eu simplement là un événement heureux, aux conséquences discutables. Ce qui rendait cet événement décisif, d’une portée considérable, c’était que le peuple paysan, aux Combettes triomphait de son côté, dans le commun effort, dans l’association qui s’était faite entre le village et l’usine. Là aussi, il n’y avait qu’un commencement, mais quelle promesse de prodigieuse fortune  ! Depuis le jour où le maire Lenfant, et son adjoint Yvonnot réconciliés par leur besoin de s’entendre, s’ils voulaient lutter et vivre, avaient décidé tous les petits propriétaires de la commune à s’associer, à joindre leurs bouts de champs les uns aux autres, afin d’en constituer un seul et vaste domaine de plusieurs centaines d’hectares, une fertilité extraordinaire s’y était déclarée. Jusqu’alors, en ces derniers temps surtout, la terre semblait y avoir fait faillite, comme dans toute l’immense plaine de la Roumagne, autrefois si féconde, maintenant d’apparence ingrate, couverte d’épis grêles et rares. Ce n’était, à la vérité, qu’un effet de la paresseuse lassitude et de l’ignorance entêtée des hommes, les méthodes surannées, le manque d’engrais, de machines et de bonne entente. Aussi quelle leçon, dès que les