Page:Zola - Travail.djvu/429

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«  Ah  ! ça, je veux bien  ! J’en ai assez, de toi, et des autres, et de moi-même, et de la vie  ! Si c’est pour vivre misérable, j’aime mieux mourir.  »

Et lui s’affola de plus en plus, répétant, hurlant  :

«  Tu vas mourir  ! tu vas mourir  !   »

Mais il cherchait, tournait au travers de la pièce, n’ayant point d’arme. Pas un couteau, rien que ses deux mains, pour l’étrangler  ; et puis, lui, qu’aurait-il fait  ? se serait-il résigné à vivre encore  ? Un couteau aurait servi pour les deux. Elle vit son embarras, son hésitation d’une seconde, et elle en triompha, elle crut que jamais il ne retrouverait la force de la tuer. À son tour, elle se mit à rire, d’un rire d’ironie et d’insulte.

«  Eh bien  ! tu ne me tues donc pas  ? … Tue-moi donc, tue-moi donc, si tu l’oses  ?   »

Tout d’un coup, dans sa quête éperdue, il aperçut la cheminée de tôle, où brûlait un tel brasier de coke, que la pièce surchauffée était comme incendiée déjà. Et ce fut en lui une brusque démence qui lui fit oublier tout, jusqu’à sa fille, sa Nise adorée, endormie paisiblement là-haut, dans sa petite chambre, au second étage. Oh  ! en finir lui-même, s’anéantir, au fond de cette horreur, de cette fureur qui le transportait  ! Oh  ! emmener cette exécrable femme dans la mort, afin qu’elle ne soit plus à d’autres, et s’en aller avec elle, et ne plus vivre, puisque la vie désormais était souillée et perdue  !

Elle le cinglait toujours de son rire méprisant.

«  Tue-moi donc  ! tue-moi donc  ! Tu es bien trop lâche pour me tuer  !   »

Oui, oui  ! tout brûler, tout détruire, un incendie immense où la maison, l’usine disparaîtraient, où la ruine cette fois serait bien totale, la ruine que cette femme et son amant imbécile avaient voulue  ! Un bûcher gigantesque où lui-même tomberait en cendres avec cette femme parjure, empoisonneuse et dévoratrice, parmi les