Page:Zola - Travail.djvu/516

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par le vol de tant d’intermédiaires. Et quel meilleur jour choisir, pour fêter la réconciliation, le jour où les ennemis d’autrefois, les castes acharnées à se dévorer et à se détruire, finissaient par échanger leurs garçons et leurs filles, en des unions qui hâteraient l’avenir  ! Puisque la vie bienfaisante, grâce à sa continuelle évolution, rapprochait ainsi les cœurs, des réjouissances publiques devaient dire l’étape heureuse où l’on était arrivé, et cela dans l’allégresse des prodigieuses récoltes qui allaient emplir les greniers des Combettes. Il fut résolu que la fête aurait lieu en plein air près du bourg, dans un vaste champ, où se dressaient, pareilles aux colonnes symétriques d’un temple géant, de hautes meules couleur d’or sous le clair soleil. À l’infini, jusqu’au lointain horizon, la colonnade se prolongeait, d’autres meules, d’autres meules encore, disant la fécondité inépuisable de la terre. Et ce fut là qu’on chanta, qu’on dansa, dans la bonne odeur du blé mûr, au milieu de l’immense plaine fertile, dont le travail des hommes enfin réconciliés, tirait assez de pain pour le bonheur de tous.

Les Laboque amenèrent tout l’ancien commerce de Beauclair tandis que les Bourron amenaient toute la Crêcherie. Les Lenfant étaient la, chez eux, et jamais encore on n’avait fraternisé si largement, les divers groupes mêlés, confondus en une seule famille. Sans doute, les Laboque restaient graves, l’air gêné. Mais, si les l’enfant s’égayaient de bon cœur, la grande joie fut Babette Bourron, qui triomphait avec son éternelle belle humeur, sa certitude de voir, au travers des pires tourments, les choses finir quand même très bien. Elle était l’espérance, elle rayonnait derrière les deux couples, et lorsque ceux-ci arrivèrent, Marthe Bourron au bras d’Auguste Laboque, Eulalie Laboque au bras d’Arsène Lenfant, ils apportèrent un tel éclat de jeunesse, de force