Page:Zola - Vérité.djvu/127

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avoir inutilement cherché un témoin, un gardien, un passant quelconque, ayant aperçu Simon dans son retour à pied, de Beaumont à Maillebois, selon sa version. Par contre, il est vrai, elle n’avait pu établir le retour en chemin de fer, selon la sienne, aucun employé ne se souvenant d’avoir vu Simon, et plusieurs billets de retour ayant manqué, ce soir-là, sans qu’on fût arrivé à en connaître les possesseurs. Les témoignages du frère Fulgence et du père Philibin semblaient aussi devoir être très graves, surtout celui de ce dernier, qui, affirmait-on, avait la preuve accablante que le modèle d’écriture sortait bien de l’école de Simon. Et, pour finir, les deux experts choisis par le parquet, les sieurs Badoche et Trabut, venaient formellement de reconnaître dans le paraphe illisible, le trait à peine indiqué, les deux initiales de Simon, un E et un S majuscules, enlacés l’un à l’autre.

Dès lors, l’acte d’accusation se dressait. Simon mentait, il était sûrement rentré de Beaumont par le train de dix heures et demie, qui arrivait à Maillebois en douze minutes. Il devait donc être onze heures moins un quart précises, lorsqu’il était arrivé chez lui ; et c’était bien à cette heure-là que Mlle  Rouzaire affirmait l’avoir entendu ouvrir les portes, marcher et parler. D’autre part, il semblait certain que, ramené de la chapelle des Capucins à dix heures, le petit Zéphirin ne s’était pas couché tout de suite, s’amusant à ranger des images de sainteté, laissées bien en ordre sur la table ; de sorte qu’on pouvait placer la scène du meurtre entre onze heures moins un quart et onze heures. Et, tout naturellement, les faits se déroulaient, Simon apercevait de la lumière chez son neveu, entrait, le trouvait en chemise, sur le point de se mettre au lit. Sans doute, à ce moment, devant ce petit ange, au maigre corps d’infirme, il avait cédé à un coup de folie érotique ; mais on établissait