Page:Zola - Vérité.djvu/333

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— Vous pouvez garder à dîner votre neveu, je vous le permets.

Et la vieille servante, de sa voix grondante et agressive, répondit :

— Ah ! le pauvre enfant, il a bien besoin de se refaire un peu, après la violence qu’on a voulu exercer sur lui, tantôt !

Marc comprit brusquement, ces dames étaient au courant de sa trouvaille du modèle d’écriture, par un rapport du jeune homme, accouru chez sa tante pour tout lui conter, dans un but qui restait obscur, et il ne put s’empêcher de rire.

— Oh ! oh ! qui donc a voulu violenter Polydor ? Serait-ce moi, cette après-midi, chez les dames Milhomme, où le cher garçon s’est permis de me duper agréablement, en faisant la bête ?

Mais Mme  Duparque n’accepta pas cette façon ironique de traiter une question si grave. Elle parla sans colère apparente, avec sa rudesse froide, de son air tranchant qui n’admettait pas même de défense. Etait-ce possible que le mari de sa Geneviève s’obstinât encore à réveiller cette abominable affaire Simon ? Un assassin immonde, condamné justement, qui ne méritait pas la moindre pitié, et dont on aurait bien dû couper la tête, pour en finir une bonne fois ! Une coupable légende d’innocence, dont les pires esprits entendaient se servir dans le but d’ébranler la religion et de livrer la France aux juifs ! Et voilà que Marc, en s’obstinant à fouiller ce tas de malpropretés, prétendait avoir trouvé la preuve, le fameux fait nouveau, annoncé tant de fois ! Une belle preuve en vérité, un bout de papier, venu on ne savait d’où, ni comment, toute une invention d’enfants qui mentaient ou qui se trompaient !

— Grand-mère, répondit Marc avec tranquillité, nous étions convenus de ne plus parler de ces choses, et c’est vous