Page:Zola - Vérité.djvu/629

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

terrible Palmyre, grande distributrice de taloches et de fessées. Un autre jour, il gifla la jeune Catherine, coupable d’avoir ri pendant la messe, au moment où lui-même se mouchait à l’autel. Enfin, le dernier dimanche, hors de lui de voir que le pays, décidément, lui échappait, il avait allongé un coup de pied à Mme  Martineau, la mairesse, s’imaginant qu’elle le bravait, parce qu’elle ne se rangeait pas assez vite sur son passage. Et, cette fois, cela dépassait vraiment toute mesure, Martineau déposa une plainte, poursuivit en police correctionnelle le curé, qui, dès lors, continua la lutte, se débattit furieusement, au milieu d’un tas de procès.

Mais, pour achever son œuvre, Marc nourrissait une idée qu’il put enfin réaliser. À la suite des lois nouvelles, les sœurs du Bon Pasteur qui exploitaient si âprement un atelier de lingerie, où deux cents ouvrières mouraient à moitié de surmenage et de faim, venaient d’être obligées de quitter Jonville ; et c’était un grand débarras pour le pays, une plaie et une honte de moins. Marc avait donc décidé le conseil municipal à se rendre acquéreur des vastes constructions, vendues aux enchères. Son projet était d’aménager ces constructions, ces grands ateliers, en une maison commune, où l’on pourrait installer, au fur et à mesure des ressources, une salle de jeux et de danse, une bibliothèque, un musée, même des bains gratuits. La pensée profonde de Marc était de dresser en face de l’église, pour achever de la vider, une sorte de palais civique, où le peuple des travailleurs trouverait un lieu de réunion et de délassement. Si, longtemps, les femmes n’avaient continué de se rendre à la messe que pour montrer leurs robes neuves et voir celles des autres, elles viendraient désormais plus volontiers dans ce palais de solidarité riante, où un peu de plaisir bienfaisant les attendait. Et la salle de récréation, inaugurée la première, donna lieu à une grande manifestation populaire.