Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/216

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rime : Berlin, Moscou, Sakhaline, les Baléares, et d’autres îles lointaines. Le progrès des sciences le force à inventer chaque jour de nouveaux termes, les nouvelles machines nécessitent l’éclosion de mots neufs, et c’est une source nouvelle qui pour la première fois vient de jaillir pour que vienne s’y rafraîchir toute la langue lyrique.

Cependant cette richesse incroyable comporte un écueil : ce n’est pas la pauvreté, ni l’étroitesse, c’est ce qu’on pourrait appeler l’emprise de certains termes. Un sentiment qui s’affirme unilatéral, s’il présente des avantages, offre aussi des inconvénients. S’il est vrai que la constance de la passion confère au poème verhaerenien un caractère d’éloquence et de prédication, elle ne va pas sans engendrer une certaine monotonie dans les images. Verhaeren semble subir la fascination de certains mots : images, épithètes, tournures de phrase. On les trouve répétés sans cesse à travers toute son œuvre. C’est à un brasier qu’il compare toutes les choses qui évoquent des passions multiples. Carrefour est pour lui le symbole de l’indécision. Par le mot essor, il exprime l’effort suprême. Des exclamations et des cris se répètent