Patrimoine et Identité/Un patrimoine religieux

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Un patrimoine religieux




Les observations que j’ai pu faire et les divers entretiens que j’ai effectués avec les habitants des Fougerêts m’ont conforté dans l’opinion que les aspects religieux de la commune ont une place importante, et peuvent être considérés comme du patrimoine. Ces éléments du patrimoine religieux que je vais exposer sont de divers ordres. En effet, il s’agit à la fois de l’église paroissiale figurée par son clocher, repère et symbole visuel de la paroisse, des croix de chemins qui jalonnent les routes, les carrefours et sentiers. Il s’agit également des chapelles quelques fois en ruines ou disparues, et des œuvres d’art religieux qui restent bien souvent soustraites à la connaissance et au regard des paroissiens. Dans ce chapitre, je ne vais exposer que les réalités matérielles qui se réfèrent au patrimoine religieux des Fougerêts.

Les croix de chemin.[modifier]

J’ai remarqué en parcourant les routes et les sentiers de la commune qu’il existait un important corpus de croix de chemin. J’en ai recensé dix-huit auxquelles vient s’ajouter un simple piédestal. Dans mon travail préliminaire qui consistait à inventorier l’ensemble du patrimoine des Fougerêts, je me suis attaché à recueillir le maximum d’informations au sujet de ces croix. Elles sont de datations variées, la plus ancienne aurait été édifiée au XV ème siècle et la plus récente n’a qu’une cinquantaine d’années. J’ai pu ainsi dégager les grandes caractéristiques de cet aspect du patrimoine religieux. Il me paraît nécessaire d’aborder en premier lieu les matériaux qui ont été utilisés dans la construction de ces diverses croix. Les croix en ciment sont au nombre de six, cinq sont en schiste. Il y a quatre croix construites en granite, deux en bois et une en fer. Le schiste a été vraisemblablement extrait des ardoisières des Fougerêts. Les matériaux utilisés ne fournissent pas toujours d’informations spécifiques quant à la date d'édification. La croix en bois du Calvaire porte l’inscription « 1820 », alors que la croix en schiste de l’Auté Garel date de 1875. Les croix en granite sont, semble t-il, les plus anciennes. Ce sont celles du cimetière, classée aux Monuments Historiques, de la Brousse et des Boissières qui sont datées du XV ème et XVII ème siècles. Les croix en ciment sont les plus récentes, le plus souvent du XIX ème et XX ème siècles.

La localisation de ces croix n’est pas le fruit du hasard. En effet, elles sont implantées à des endroits particuliers. Aux Fougerêts, les croix sont érigées le long d’anciens chemins qui sont, plus tard, devenu des routes. Ces croix sont donc situées en bordure de route comme celles de la Croix Neuve, de Trêveret et de l’Auté Garel. Certaines sont également placées à des intersections ou carrefours, par exemple la Croix du Rond-point, du Patis Sébillet et celle du Bas du Bourg. L’implantation s’est fait aussi sur les hauteurs, je pense particulièrement à la croix de Rochenais ou celles de la Grée. Il y a deux croix érigées le long d’anciens chemins qui ont aujourd’hui disparu : la croix des Boissières et la Croix Borne, dont il ne reste que le piédestal. La localisation et l'édification des différentes croix ont pour objectif « (…) la christianisation du paysage (…) » et de placer « (…) l’espace paroissial et la communauté des habitants sous le signe du christ. » J’ai pu retrouver les raisons d’implantation pour quelques-unes de ces croix des Fougerêts. La croix de l’Auté Garel a été « Faite faire par Martin Fresche en 1875 ». L’entretien avec H1 m’a appris que « (…) mon grand-père bisaïeul, il avait fait un vœu, si j’arrive à payer ces deux hectares là, je ferais une croix. » Il s’agit ici d’une dévotion personnelle qui a été à l’origine de la mise en place de cette croix. La croix de la Cordonnais, ou la croix Sainte-Anne, a été édifiée au cours du XIX ème siècle à partir d’un élément sacré. Il s’agit, en fait, d’un fragment d’une table d’autel de la chapelle Saint-Jacques du Pont d’Oust qui était alors en ruine. Cette hypothèse est vérifiable par une rainure creusée sur l’arête supérieure de la croix et sur l’une des branches. J’ai observé également une cavité sur cette dalle de granite dans laquelle « la pierre consacrée » était placée. Il s’agit, dans ce cas, d’une réutilisation d’un élément sacré, l’autel, pour la construction d’une nouvelle croix de chemin. Les croix les plus récentes sont des « croix de mission », elles ont été érigées aux XIX ème et XX ème siècles au cours des missions religieuses qui réapparaissent après la période révolutionnaire. La croix de la Grée est un exemple de ces croix implantées à l’issue d’une mission. Elle a été transportée de l’église jusqu’à la Grée de la Touche par des jeunes Fougerêtais le 19 décembre 1921 et bénie par l’abbé Montfort. Les croix les plus anciennes semblent répondre, quant à elles, à ce souci de « (…) christianisation du paysage (…) », par exemple, la croix de la Brousse du XVI ème ou XVII ème siècles, et la croix du cimetière du XV ème ou XVI ème siècles, autrefois placée dans l’enclos paroissial avant son déplacement dans l’actuel cimetière.

Je voudrais désormais exposer certaines particularités des croix des Fougerêts en m’attachant plus précisément à leurs descriptions. Tout d’abord, je vais mettre en évidence certaines ressemblances entre les croix en schiste. Celles-ci sont, en effet, construites dans les mêmes matériaux mais j’ai observé d’autres similitudes dans la forme de ces croix. Ce sont des croix latines aux branches échancrées (branches horizontales ne se situant pas au centre de la croix mais dans la partie supérieure, et plus larges aux extrémités qu’à la base.) Les croix de schiste des Fougerêts sont également édentées, en ce sens qu’aux extrémités des branches, il est possible d’observer une incision pratiquée par le tailleur. Ainsi, les croix de Tréveret, du Rond-point et du Bas du Bourg se ressemblent parfaitement.

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Je peux émettre l’hypothèse que le modèle utilisé, par les artistes locaux, est une croix qui surmontait la chapelle Saint-Jacques, et qui est resté longtemps à l’abandon.

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Certaines croix des Fougerêts présentent l’intérêt d’être d’une qualité artistique indéniable. Il s’agit à la fois de croix particulièrement élaborées et rares. Ces croix sont celles du cimetière et de l’Auté Garel. La croix du cimetière a été classée aux Monuments Historiques en mai 1937.

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La description du pré-inventaire du Service de l’Inventaire et de l’Etude de la Commission des Monuments Historiques de 1937 évoque « (…) une croix assez trapue, s’élevant sur un socle massif en maçonnerie. Une large pierre sert de base au fût cylindrique. Celle-ci protégée par un auvent à deux pentes formant toiture, présente d’un côté le Christ avec la Vierge et Saint-Jean, et de l’autre une Pietà (…) », c’est à dire Marie tenant sur ces genoux le corps inanimé de son divin Fils. Toutefois, ces organismes ne sont pas d’accord à propos de la datation.

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Les Monuments Historiques proposent le XVII ème siècle. Le Service de l’Inventaire pense plutôt au XV ème siècle en raison de la position des pieds du Christ présentant l’« (…) amorce d’une flexion interne (…) ». Le chanoine Royer propose « (…) une œuvre du XVI ème siècle ou des toutes premières années du XVII ème (…) »11. Il s’agit de toute façon d’une croix remarquable à la fois par sa qualité et par sa rareté dans le Canton de La Gacilly, à l’exception d’une croix à Cournon.

La seconde croix qui présente un intérêt particulier est celle de l’Auté Garel.

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Sa spécificité tient au tracé géométrique de sa partie supérieure. Il s’agit, là aussi, d’une croix latine échancrée, mais dont les branches sont redentées. Cette particularité est rare dans tout le pays de Redon, c’est pourquoi je voulais la présenter précisément. La forme géométrique a été tracée au compas, pour preuve le trou minuscule au centre de la croix causé par la pointe de cet instrument. Ce dessin très élaboré peut avoir été tracé à partir de l’observation d’une croix des Templiers.

La commune des Fougerêts possède un patrimoine de croix de chemin très riche. Cette richesse tient essentiellement à la diversité et à la qualité et non pas à la quantité. L’association patrimoniale de Saint-Martin-sur-Oust, « le Travouillet », a recensé sur cette commune voisine des Fougerêts plus de cinquante croix de chemin. Il me semble important d’ajouter que ces différentes croix sont régulièrement entretenues, aussi bien le site, la statue, que la niche. Cependant, j’ai pu observer que ce sont les personnes les plus âgées qui sont les plus sensibles à ce type de patrimoine. Cette sensibilité peut avoir pour origine les pratiques religieuses liées à ces croix, comme la Fête-Dieu, lorsque le recteur exposait le Saint-Sacrement à ses paroissiens. La procession aux Fougerêts, après la messe, se recueillait à la croix du Bas du Bourg, au cimetière puis à la croix Sainte-Anne.


L’église paroissiale.[modifier]

L’église paroissiale des Fougerêts appartient, elle aussi, à ce patrimoine religieux. Les habitants des Fougerêts m’ont semblé particulièrement fiers de leur église. Afin de présenter cette église paroissiale je me suis appuyé sur les différentes sources que j’ai exposées dans le chapitre consacré à la méthodologie ; mais à cela s’ajoute une visite faite le 05 novembre 2001 avec l’abbé Roger Blot de l’Archevêché de Rennes. Cette visite a confirmé certaines de mes hypothèses et a pu éclaircir certains passages des travaux du chanoine Royer.


Présentation générale.[modifier]

Je pense qu’il faille, tout d’abord, présenter d’une manière générale l’église paroissiale, à savoir sa localisation précise, les matériaux utilisés pour la construction et les différents éléments de cet édifice. L’église Notre-Dame de la Nativité se situe au cœur du bourg des Fougerêts.

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Son axe est l’axe habituel des églises, soit une orientation est-ouest. L’église des Fougerêts domine les marais de l’Oust et le passage du Pont d’Oust. L’édifice mesure trente et un mètres de longueur, et sa largeur au maximum est de dix-sept mètres. Sa hauteur avoisine les trente mètres. Sa forme est en croix latine. Les principaux matériaux utilisés pour la construction sont en majorité du schiste, mais il y a aussi du grès et du quartz. Il faut également ajouter à cette description générale de l’église la présence d’un if planté en 2000. Ces arbres, liés à la présence d’un lieu de culte, ont marqué fortement les esprits locaux. En 1869, deux ifs plusieurs fois centenaires se situaient au cœur de l’enclos paroissial. L’un d’eux, avant de mourir, a soutenu les cloches pendant la reconstruction d’un nouveau clocher. Enfin, le dernier if disparaît en 1979 de vieillesse. Les Fougerêtais de tout âge connaissent l’existence de ces ifs et en font un symbole local. Les enfants de l’Ecole en 2000 à la suite d’un spectacle retraçant l’Histoire de la commune ont solennellement demandé la plantation d’un nouvel if au Maire, lequel a accepté.

L’aspect actuel de l’église paroissiale est particulièrement récent puisqu’un incendie l’a défigurée en janvier 186916. Après cet incendie causé par la foudre, un nouveau clocher à flèche polygonale a été ajouté en remplacement de l’ancien « (…) clocher gothique (…)». Ce petit clocher d’ardoise était placé au centre de l’édifice, au milieu du faîte. L’église paroissiale présente plusieurs autres éléments typiques dont une nef, un chœur à chevet plat, un chapitret et trois chapelles latérales que je vais étudier ultérieurement.


La nef.[modifier]

La nef d’une église peut être considérée comme l’élément principal, structurant l’ensemble de l’édifice religieux. Sa largeur est d’environ huit mètres, et sa longueur de vingt-deux mètres. J’ai pu observer, dans cette nef, différents éléments qui méritent une description plus précise. Le dallage de la nef est fait de grandes dalles de granite de dimension peu variable. Il n’existe plus qu’une seule pierre de dallage, illustrant les inhumations qui se faisaient autrefois dans l’église. Cette pierre tombale constitue le seuil de la porte du chapitret, malheureusement les inscriptions sont illisibles. L’étude des registres paroissiaux indique que la vingtaine d’inhumations annuelles s’est fait dans la nef de l’église jusqu’au milieu du XVIII ème siècle. L’absence de pierres tombales peut s’expliquer par les travaux de restauration qui ont suivi l’incendie de 1869. Les murs de la nef sont aujourd’hui recouverts d’un enduit de couleur beige clair. Il y a dans les murs de la nef ce que l’on appelle une piscine ou un lavabo. Il s’agit d’une niche, construite en granite, au sommet tri-lobé divisée en deux parties séparées par une plaque de schiste.

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Aujourd’hui, ces lavabos servent à entreposer les livres de messes mais l’utilisation originelle est tout autre. Ils indiquent la présence d’un autel. La partie supérieure des lavabos était utilisée pour y déposer le mobilier liturgique ; alors que la partie inférieure formait un bassin dans lequel le prêtre se purifiait les mains. Au fond de ce bassin, un trou permettait à l’eau d’être évacuée. Il existe deux vitraux construits dans les murs méridionaux de la nef de l’église paroissiale. Ces vitraux sont récents, ils datent des années soixante. Les fenêtres qui les supportent sont également en granite avec deux baies jumelles rectangulaires au sommet tri-lobé, surmontées d’une représentation figurant une colombe à moins qu’il ne s’agisse d’une fleur de lys.

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Toutefois, les deux fenêtres de la nef sont identiques, ce qui montre, je pense, qu’elles n’ont pas été modifiées et qu’elles sont de la même époque. Enfin, la description de la nef de l’église paroissiale ne peut être complète sans évoquer la voûte qui la surplombe. Cette voûte présente un véritable intérêt. Celle-ci est en forme de coque de navire, constituée par un lambrissage horizontal. La charpente de la nef repose sur des poutres en bois. Il y a, tout d’abord, une poutre horizontale, appelée le tirant, qui s’appuie sur les murs de la nef. Au centre du tirant repose verticalement, une seconde poutre, le poinçon.

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Sur chaque mur, j’ai observé des sablières, c’est à dire des poutres en bois, lesquelles « (…) supportent les éléments structurels de la charpente. » Ces sablières ne présentent pas de frises sculptées. Il y a, néanmoins, aux extrémités des tirants des sculptures diversifiées.

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Les tirants de la nef peuvent fournir des informations très utiles pour visualiser son aspect avant les restaurations de 1869 et 1870. Au centre de la nef, deux tirants « (…) brisent l’harmonie générale ; ils sont trop rapprochés et d’ailleurs grossièrement travaillés (…) ». Ces tirants, qui ne sont sculptés que sur leurs faces extérieures, illustrent la présence d’un mur sur lequel reposait l’ancien clocher. Ce mur séparait la nef en deux parties, confirmant les témoignages oraux transmis par le chanoine Royer selon lesquels il était difficile pour les femmes, reléguées à l’arrière de la nef, de suivre les messes. Selon ces témoignages, les hommes entraient par une porte, située entre cet ancien mur et le chœur de l’église, appelée « Porte des hommes ».


Le chœur.[modifier]

Le chœur de l’église est un pivot incontournable d’une description d’un édifice religieux. Le chœur à chevet plat de l’église paroissiale des Fougerêts est aménagé autour de deux principaux éléments. Je vais, dans un premier temps, décrire le grand vitrail qui surplombe le retable.

La fenêtre qui supporte ce vitrail est une simple ouverture cintrée, comparée aux ouvertures travaillées de la nef. Ce vitrail s’inscrit dans les travaux de restauration de l’église après l’incendie de 1869. Financé par M. de la Houssaye, du château de la Ville Chauve, le vitrail représente la « (…) Vierge de l’Immaculée Conception, au croissant, foulant aux pieds un serpent (…) », et est l’œuvre des ateliers Reby de Nantes26. Le vitrail du XIX ème siècle remplace un ouvrage beaucoup plus ancien fortement abîmé par les outrages du temps et des hommes. Le chanoine Royer est parvenu à retrouver une enquête du XVIII ème, faite par des commissaires du comte de Rieux, au cours de laquelle ceux-ci décrivent un vitrail qui datait selon les blasons des années 1530-1531.27

Le second élément du chœur de l’église paroissial qui présente une valeur patrimoniale est le retable du maître-autel, c’est à dire l’autel principal de l’église28. L’organisation du chœur a été modifiée au cours du XX ème siècle, spécialement après le Concile du Vatican II. A partir de 1965, le prêtre s’est vu obligé de célébrer la totalité de l’office face aux paroissiens. Il a été installé aux Fougerêts, comme partout, une nouvelle table d’office. Ce qui m’intéresse ici ce n’est pas l’autel actuel mais l’ancien maître-autel et son retable, qui se situe sous le grand vitrail du chœur29. Le retable impressionne par sa masse et par la richesse de sa décoration, malgré sa simplicité. Il est composé de trois éléments distincts. La partie inférieure est constituée par un socle de dix centimètres d’épaisseur, d’environ deux mètres de long et de cinquante centimètres au plus de largeur. Au centre de cette partie, sous le Tabernacle, il existe un tiroir utilisé, selon le chanoine Royer, autrefois pour y entreposer les reliques30. Cette partie inférieure du retable est décorée d’entrelacs de feuilles recouvertes de peinture dorée. Ce premier élément du retable repose directement sur l’autel en granite, au centre duquel repose la pierre consacrée. La seconde partie du retable est celle qui est la plus imposante de l’ensemble. Elle est elle-même constitué de trois éléments distincts. La partie supérieure est constituée de cinq têtes d’anges à sept boucles de cheveux. Dans la partie inférieure, la décoration est constituée de cinq ensembles de deux feuilles reliées par une broche circulaire. La partie intermédiaire est composée de cinq panneaux. Chacun de ces panneaux est composé quant à lui d’une niche dans laquelle une statuette est entreposée31. Les niches sont situées au centre d’une reproduction de temple aux frontons triangulaires et circulaires soutenus par des pilastres aux chapiteaux composites, doriques et corinthiens. Les panneaux aux temples circulaires sont au nombre de trois et ils constituent le Tabernacle. Le panneau central ne comporte pas de niche mais une représentation du Saint-Sacrement. Au total, douze piliers torsadés limitent les cinq panneaux du retable. Enfin, l’élément supérieur du retable est une balustrade qui s’étend sur l’ensemble des cinq panneaux. Il y a quatre petits lanternons et deux statues au-dessus du Tabernacle, elles aussi, recouvertes de peinture dorée. Les avis divergents quant à la datation et à l’origine de l’artiste. Le chanoine Royer pense que ce retable est « (…) dans le style italien de la première moitié du XVII ème siècle (…)»32. Pour cet érudit, il s’agirait une œuvre d’ « (…) une des équipes d’ouvriers italiens qui, au XVII ème siècle, parcouraient nos campagnes pour garnir d’autels et de retables en bois les églises et les chapelles (…) »33. L’abbé Roger Blot propose aussi comme datation la seconde moitié de ce XVII ème siècle en raison «  (…) des sept boucles de cheveux des anges, qui sont typiques du style Louis XIII (…) ». Pour cet expert de l’architecture religieuse de l’Archevêché de Rennes, il s’agit vraisemblablement « (…) d’un artiste, un menuisier local qui a produit ce retable à la vue de la simplicité des différentes statues et de l’ensemble (...) ». Des travaux d’inventaire des retables de Bretagne proposent pour la construction du retable de l’église paroissiale des Fougerêts le XVIII ème siècle, mais ils ne donnent aucune indication quant à l’artiste et à son origine34. Toutefois, il semble évident que ce retable est fortement influencé par l’art de la Renaissance.

L’aspect du maître-autel qui est devant mes yeux a, cependant, évolué depuis quelques années. Le Concile du Vatican II a imposé la présence d’une nouvelle table d’office. Après une restauration de l’église en 1993, cette table est venue soutenir le retable au fond du chœur, tandis qu’apparaît une nouvelle table d’office plus moderne. Le nouveau dessous du maître-autel est moins large que l’ensemble du retable. Celui-ci dépasse d’environ dix centimètres de chaque coté, ce qui lui donne un aspect particulièrement brinqueballant. Il y a dans la chapelle des fonds baptismaux, un dessous d’autel. Ce panneau composé d’un tableau central et de riches décorations latérales ornait le maître-autel de l’église paroissiale avant 1993 mais aussi autrefois l’autel de la chapelle castrale de la Jouardays35. Malheureusement, ce soubassement est laissé à l’abandon sans aucune protection dans cette chapelle particulièrement humide. Il est à noter, également, qu’avec l’estrade, le maître-autel cache la partie inférieure du grand vitrail, ce qui donne un aspect assez singulier.

Les chapelles et le chapitret.[modifier]

Il y a, dans l’église paroissiale des Fougerêts, trois chapelles et un chapitret qui sont accolés à la nef. Ces appendices donnent à l’église sa forme finale. La première de ces chapelles est la chapelle baptismale. Elle a été construite en 1895-1896. De l’extérieure, il est possible d’observer que le mur de construction n’est pas composé des mêmes pierres que le mur principal. Ces pierres sont beaucoup plus modestes et variées. Cette chapelle sert apparemment de débarras ; c’est là que de nombreux objets sont entreposés comme une bannière dédiée à Jeanne d’Arc et un soubassement d’autel. L’entrée de la chapelle est surmontée d’un crucifix qui selon le chanoine Royer date du XVII ème siècle. Il convient maintenant de décrire les deux chapelles latérales qui forment le transept de l’église paroissiale. Ces deux chapelles datent du début du XVII ème siècle ; toutefois, je n’ai pas pu déterminer à quand remonte précisément la construction. Ces chapelles sont d’origine seigneuriale, en ce sens qu’elles ont été édifiées par des familles de seigneurs résidents aux Fougerêts. La chapelle orientée au nord est la chapelle de la Jouardays, et celle orientée au sud, est la chapelle de la Ville Caro ou du Pont d’Oust. Vraisemblablement construites à peu d’intervalles, elles possèdent quelques similitudes. Tout d’abord, leur aspect général est le même. Il s’agit de chapelles rectangulaires, ouvertes sur le chœur par une porte en ogive. La charpente repose sur de simples sablières, et s’appuie sur un tirant et un poinçon. Deux autels construits après 1869 reposent contre les murs Nord et Sud. J’ai observé dans ces deux chapelles, deux lavabos du même aspect que celui de la nef à l’exception de la partie supérieure en forme de flamme. Ces lavabos indiquent la présence d’anciens autels aujourd’hui disparus. Au-dessus du lavabo de la chapelle de la Jouardays, se trouve une fenêtre en granite orientée à l’Est, à l’extérieure de laquelle est gravé un écusson. Ce blason est celui de la famille de Maigné, « d’argent à la croix cantonnée de quatre tourteaux, le tout de gueules », c’est à dire sur fond blanc une croix rouge, formant quatre parties dans lesquelles sont placés des ronds également rouges. Sur le tirant de la chapelle de la Jouardays, il est possible d’apercevoir cet écusson en couleur qui a été conservé. Sur cette même poutre, il y a un autre blason. Il s’agit des armoiries de la famille du Pin de Montmée, successeurs des de Maigné. Cet écusson est constitué d’une diagonale surmontée de quatre ronds or sur fond rouge36. Il n’y a pas de fenêtre au-dessus du lavabo dans la chapelle du Pont d’Oust, il existe uniquement une petite rosace dans le mur sud, mais celle-ci a été bouchée après l’incendie de 1869. Dans les années soixante, une nouvelle fenêtre a été ajoutée au mur Ouest de la chapelle37. Cette fenêtre en granite provient de la chapelle de Saint-Jacob ce qui explique la différence de décoration avec les fenêtres de la nef38. Une ancienne porte a été obstruée afin d’y construire un placard, et de l’extérieur il est possible d’observer le linteau. Au centre de cette ancienne ouverture, un christ en granite a été placé mais il est rongé par les effets du temps. Enfin, tout comme l’autre chapelle, le tirant possède un blason qui est celui des Mancel : trois étoiles ou molettes sont placées en triangle sur fond d’azur et dans la partie supérieure, deux têtes de loups sur fond noir39. Ces chapelles ont été des lieux de célébration de messes pour ces familles de seigneurs. Mais, il ne reste plus aucunes indications sur le site, les pierres tombales ont disparu vraisemblablement après les restaurations de 1869-1870. Aujourd’hui, leurs caractères privés ne sont plus en vigueur mais la tradition orale locale maintient ces appellations de « chapelle de la Jouardays et du Pont d’Oust »

Le chapitret est une autre caractéristique de l’église paroissiale des Fougerêts40. Le chapitret ou chapitreau est accolé à la nef et orienté au sud. Le chapitret est une avancée construite afin de protéger une des entrées de l’église. Sa structure originelle est en bois. En effet, les pierres de schiste et de grès des murs reposent contre ceux de la nef et ne s’y intègrent pas. Cela indique que la configuration actuelle du chapitret est plus récente. Ces modifications ont heureusement laissé apparentes les poutres à l’entrée de ce chapitret41. Le dallage est en blocs monolithes de schistes de grandes dimensions. La porte du chapitret est surmontée d’un larmier récent. Cette porte est d’ailleurs appelée par les habitants des Fougerêts, « la grande porte ». La voûte est, comme celle de la nef, en forme de coque de navire avec un lambrissage horizontal assez grossier. Au cours du XIX ème siècle, un bénitier en granite de grande dimension et un morceau du piédestal de la croix-borne y ont été entreposés. Ils ne s’intègrent pas dans, ce que j’appelle, l’ensemble (architectural) chapitret. Cependant, pour les habitants de la commune et les paroissiens, ces deux éléments appartiennent entièrement au patrimoine lié à l’église paroissiale. Il n’est pas possible d’émettre une proposition précise quant à la date de construction. Toutefois, je pense pouvoir affirmer que le chapitret existait déjà au XVII ème siècle. La dénomination « chapitreau » est liée au lieu des assemblées ( ou chapitres) du « général de la paroisse »42. Pour Henri-François Buffet, « (…) une des caractéristiques des églises anciennes était la présence ordinairement sur le côté sud, d’un porche appelé « chapitret », muni de bancs, qui servait sous l’Ancien Régime aux réunions du « général » de la paroisse. »43


Les chapelles et la grotte de Rochenais.[modifier]

J’ai choisi, dans ce chapitre du patrimoine religieux des Fougerêts, d’évoquer deux chapelles et une grotte artificielle à vocation religieuse. Je vais montrer que ces différents lieux de cultes, même disparus ou qui risquent de l’être dans peu de temps, appartiennent au patrimoine puisqu’une partie des Fougerêtais leur donnent une certaine importance.

La première de ces chapelles est la chapelle Saint-Jacques du Pont d’Oust. Celle-ci n’existe plus mais elle reste présente dans les esprits de quelques Fougerêtais grâce aux quelques éléments architecturaux ou mobiliers qui subsistent. Située au Pont d’Oust au hameau de la Saudraie, cette chapelle, annexe du Temple de Carentoir étaient dédié à Saint-Jacques44. L’ordre des Templiers fondé en 1119 protégeait les pèlerins sur la route de Compostelle et de simples chapelles rythmaient ce voyage. Selon le chanoine Royer, la chapelle du Pont d’Oust est le modèle à partir duquel l’église paroissiale a été construite. Après la suppression des Templiers, les biens de l’ordre reviennent aux Hospitaliers. La chapelle du Pont d’Oust est alors dédiée à Saint Jean-Baptiste mais l’appellation liée à ce saint ne perdure pas dans la tradition orale locale. Les témoignages du chanoine Royer ne font mention que de la chapelle Saint-Jacques. Les seigneurs du Pont d’Oust que j’ai déjà évoqués, s’attribueront ensuite cette chapelle et y seront inhumés. Après la Révolution française, le culte n’y est plus célébré et cette chapelle tombe en ruine. En 1877, la Municipalité qui en est propriétaire vend le terrain45.

La chapelle du Pont d’Oust peut être considérée comme un élément du patrimoine religieux des Fougerêts parce que plusieurs personnes y portent ou y ont portés un regard donc un intérêt. La connaissance de la chapelle n’est aujourd’hui transmise que par les travaux du chanoine Royer. Il ne reste que quelques éléments architecturaux et mobiliers de cette chapelle. Tout d’abord, il y a la table d’autel qui a été utilisée dans la croix Sainte-Anne, peu de personnes en connaissent toutefois l’origine. La seconde trace de la chapelle Saint-Jacques est la croix gravée qui se situait vraisemblablement dans le pignon de la chapelle. Cette pierre a été déposée près de la Mairie mais elle reste à la merci des intempéries et d’éventuels voleurs. Enfin, un habitant de la Saudraie possède chez lui un bénitier en granite. Ce bénitier de très grande taille devait être celui de la chapelle Saint-Jacques. Les Fougerêtais ne connaissent pas l’existence de la chapelle et les éléments architecturaux et mobiliers qui subsistent encore aujourd’hui. Seules certaines personnes, résidents à proximité du Pont d’Oust, transmettent ce souvenir et un intérêt46.

La seconde chapelle qui se trouve sur le territoire des Fougerêts est la chapelle de Saint-Jacob47. Elle est plus connue par les Fougerêtais puisque jusqu’au milieu du XX ème siècle, des offices y étaient célébrés. Cette chapelle se situe dans le hameau de Saint-Jacob près d’un chemin clôturé de palis de schiste, aujourd’hui en cul-de-sac. De cette chapelle, il ne reste actuellement que trois murs qui menacent de s’écrouler. L’origine du nom « Saint-Jacob » est assez floue. Selon le chanoine Royer, elle serait issue vraisemblablement de « Saint-Jacut. »48 Pourtant aux Fougerêts, les habitants les plus imprégnés du Gallo prononcent « Saint-Jaco » ce qui se rapproche de « Saint-Jacques ». C’est la raison pour laquelle les Fougerêtais pensent qu’il s’agit « (…) d’une étape sur la route de Saint-Jacques de Compostelle (…) »49. Cette chapelle était le centre cultuel d’un prieuré dépendant de l’Abbaye de Paimpont50. La fondatrice de la chapelle est Gosseline, dame de La Gacilly, qui épouse en 1180 Jean de Monteauban, un puissant seigneur du pays de Paimpont. Le prieuré de Saint-Jacob était bien distinct de la paroisse des Fougerêts. Au cours du XV ème siècle, le prieuré devient chapellenie des seigneurs de Rieux51. Le terrain de la chapelle de Saint-Jacob est finalement vendu par la Municipalité en 187752. Le plan de cette chapelle est assez simple : « (…) sa restauration fut effectuée vers la fin du XV ème siècle (…) Une petite nef, un autel, sur le toit un clocher champignon ; son architecture ne pouvait être plus simple (…) »53. Il ne reste aujourd’hui que trois des murs de la nef, le toit s’est effondré et l’autel a disparu. Toutefois, certains éléments sont encore visibles. Il y a, par exemple, sur le chemin qui mène à cette chapelle, deux blocs de schiste qui me paraissent être des tables d’autel avec, au centre, une cavité comme celle de la croix Sainte-Anne. Une fenêtre de la nef, contemporaine de la restauration de la fin du XV ème, a été ôtée et replacée dans la chapelle du Pont d’Oust de l’église paroissiale54. Enfin, les murs de la nef présentent une particularité. Les murs sont en schiste feuilleté de faible épaisseur mais la particularité tient en la présence de blocs de quartz insérés en quatre rangs horizontaux. Ces bélions octroient à la chapelle une protection contre les mauvaises vibrations de pierres mais aussi une qualité esthétique. Cette chapelle de Saint-Jacob appartient au patrimoine de la commune en ce sens qu’elle possède une importance pour les habitants des Fougerêts. Toutefois, seules les personnes de plus quarante ans connaissent l’existence de la chapelle et savent s’y rendre. Au cours du XX ème siècle, des offices y étaient célébrés et l’affluence y était régulière55. L’abandon de la chapelle est vraisemblablement antérieur à 1958 lorsqu’une fenêtre de la nef est déplacée vers l’église paroissiale. Mais en 1961, une statue en bois de Saint-Jacob est bénie par le recteur Coué. Cette statue posée sur l’un des pans de mur est le fait de la « (…) générosité d’une personne (…) »56. Cela montre un intérêt et un attachement religieux pour un lieu de culte qui commence à tomber dans l’oubli. Aujourd’hui, cette statue a disparu mais il semblerait qu’un brocanteur en soit le receleur. Pendant les années quatre-vingts et quatre-vingt-dix, des habitants du hameau ont voulu racheter le terrain de la chapelle afin de la restaurer mais en vain57. Enfin, la Grotte de Rochenais est aussi un aspect du patrimoine religieux des Fougerêts. Il s’agit d’un lieu de culte toujours fréquenté mais qui est assez difficile à définir58. Située près de la Ville Basse au centre du territoire de la commune, un chemin communal permet de s’y rendre facilement en voiture à partir de la RD 777. Cette grotte est une cavité artificielle pratiquée dans une vaine de schiste. En 1888, le Vicomte Paul de Freslon y fait bâtir un sanctuaire où la Sainte-Vierge, apparue à Bernadette Soubirous dans les années 1860-1870, sera célébrée. L’élan de religiosité du résident de la Ville Chauve a pour objectif de permettre aux habitants de la commune d’exprimer leur foi en la Vierge sans se déplacer jusqu’à Lourdes, tout en affirmant soi-même, son rôle et son parti. Il christianise un peu plus le paysage et la communauté grâce une réplique de la Grotte de Lourdes, à l’époque où les actions de la III ème République nient à la religion catholique et à ses monopôles59. Cette anfractuosité dans la roche est surmontée d’une statue de la Vierge et de Saint-Joseph. De nombreux ex-voto y sont déposés remerciant « Notre-Dame de Lourdes ». Le plus ancien que j’ai pu observer date du « 21 juillet 1904 », le plus récent de « septembre 2001 ». En 1985, la paroisse aménage le site avec notamment une table d’autel pour y célébrer des offices. Ce lieu de culte demeure également actif par une fréquentation quasi quotidienne comme le prouve les nombreux cierges brûlés. Pour beaucoup de Fougerêtais, Rochenais est un lieu de prières et de recueillement en pleine nature. La communauté locale relie moins ce lieu, aujourd’hui, au nom du notable qu’au calme et à la nature. Sa situation en fait désormais un site de promenade, de tourisme et de culte. La Grotte de Rochenais représente à ce titre pour les habitants de la commune un élément fort du patrimoine religieux où certaines pratiques, qui s’y réfèrent, existent toujours.



Les œuvres d’art.[modifier]

Les œuvres d’art religieux sont peu connues de la population fougerêtaise, même si elles ont une réelle valeur artistique. Je vais présenter ici un tableau et quelques instruments liturgiques.

Il y a, dans la chapelle de la Ville Caro, un tableau qui mérite d’être évoqué. Il s’agit d’une peinture à l’huile représentant « une lamentation sur le Christ mort »60, c’est à dire un ange et Marie soutenant Jésus devant le tombeau61. Un tiers personnage redresse le Christ devant l’ange et Marie. J’ai pu avoir accès, à la Mairie des Fougerêts, à un dossier concernant ce tableau. Ce dossier indique que ce tableau est classé aux Monuments Historiques ( Section des Antiquités de Vannes ) depuis 1982. Il s’agit d’une copie ancienne d’une œuvre de Lorenzo Lotto ( 1480-1556 ), peintre italien. L’original est conservé à Recanati, et est intégré dans un retable. Ce tableau est appelé La déploration du Christ et date de 1506. Le personnage central serait Joseph d’Arimathie. Ce tableau a été restauré en 1991 pour le sauvegarder d’une disparition certaine. Les membres de la paroisse savent uniquement que cette « (…) peinture a de la valeur (…) ». Cependant, cette peinture est «  (…) considérée comme une œuvre majeure [ de Lorenzo Lotto] et cette copie [ du XVII ème ou XVIII ème] est considérée comme l’un des quatre plus beaux tableaux du patrimoine morbihannais (…) »62. De quelle manière cette œuvre est arrivée aux Fougerêts ? L’hypothèse la plus probable est qu’il s’agisse d’un don d’une famille aisée.

Les instruments liturgiques sont les éléments principaux de cet art religieux. Cependant, les paroissiens sont très discrets sur leur présence. Six de ces objets sont inscrits aux Monuments Historiques et ils dépendent du Service des Antiquités de Vannes. Les deux premiers de ces instruments liturgiques sont des calices. Le premier calice n’est pas précisément daté puisque le poinçon est anonyme mais le Service des Antiquités propose le XVII ème siècle63. Il s’agit d’une structure d’ensemble en vermeil. Les décorations sont les Instruments de la Passion, des angelots et des fruits. Il y a une simple inscription « RO : F » qui ne permet pas de regrouper des informations complémentaires, si ce n’est qu’il doit s’agir d’un prêtre officiant aux Fougerêts. Le chanoine Royer, lui, a retrouvé un « (…) acte daté du 18 mars 1643, un certain Bonaventure Lévy (…) orfèvre à Nantes reconnaît avoir reçu de Claude Denis « fabrique de la paroisse des Fougerêts », « trois vieux qualisses à plataines » (…) en échange de quoi il lui a remis deux calices, « l’un tout vermeil et doré, l’autre doré par les garnissons » (…) »64. Le second calice, également en vermeil, présente l’intérêt d’offrir plus d’informations quant au commanditaire, à l’orfèvre et à la date de création. Le poinçon précise que l’orfèvre est Pierre I Sevin de Nantes mort en 164765. La décoration est assez simple avec des motifs végétaux et une croix en partie effacée. Une inscription sous le calice précise également le commanditaire : « M : I : GUIHAR », Messire Jean Guyhart vicaire de la paroisse entre 1635 et 1675. Trois croix sont inscrites aux Monuments Historiques. Il s’agit d’une croix d’autel, d’une croix de procession et d’une croix reliquaire. Elles ont été construites entre le premier quart du XVII ème siècle pour la croix d’autel, et la fin du XVIII ème siècle pour la croix reliquaire. Il s’agit d’œuvres de qualités et de grand intérêt puisque l’on connaît les différents orfèvres ( Henri Auger de Paris, Jean Buchet de Vannes et Joseph Pierre Marie Tiret de Vannes ) et certains des commanditaires. Par exemple pour la croix reliquaire, une inscription affirme qu’ « ici est enferme l authentique de la precieuse relique de la vraie crois cy dessus inserer aux frais de M. Joph Geheneux (…) de st Pierre de Vannes pour la psse de nre dame des fougerais l an 1786. » Ce Joseph Geheneux était originaire des Fougerêts. Enfin, un encensoir et une navette, « (…) œuvre de grande qualité dont il y a peu d’exemplaires en Bretagne (…)» sont classés aux monuments Historiques66. Pour cet instrument liturgique, il est possible également de connaître le commanditaire grâce à une nouvelle inscription : « Donnee par jacquette houeix fe de danilo a la psse des fougarets en 1773 », et par le poinçon de Charles Brouard de Nantes.

Outre l’intérêt historique et artistique de ces objets liturgiques, ce qu’il m’intéresse ici, c’est de mettre en évidence une réelle difficulté d’accessibilité à ce patrimoine religieux paroissial. Lorsque j’ai évoqué la présence de ces instruments, les Fougerêtais ignoraient leur existence ou bien restaient très vague : « Il faudrait voir cela avec M. le Recteur car je ne sais pas vraiment si vous pouvez (…) ». Le chanoine Royer, lui aussi, entretient cette discrétion et la peur du voleur : « (…) Si les meubles de la sacristie renferment quelques beaux ornements et des vases sacrés dignes de leur auguste destination ; les pièces de valeur que possède notre église sont gardées en lieu sûr. En fait, les cambrioleurs n’y trouveraient pas de quoi payer de leur peine. »67 Ce patrimoine est inconnu de la majorité de la population car soustrait à leur regard. Il me vient à l’esprit de comparer cela, à ce qui a été fait à Saint-Médard-sur-Ille, où les calices sont entreposés sous une vitrine protégée de la chapelle baptismale. Dans cette petite commune d’Ille-et-Vilaine, des descriptions détaillées accompagnent ces objets eux-aussi inscrits aux Monuments Historiques. Cependant, comme le souligne le Président du Conseil Paroissial : «  (…) quel intérêt pour le commun des mortels (…) ? »

Le patrimoine religieux est un aspect majeur du patrimoine de la commune des Fougerêts par la qualité des différents éléments. Il existe un attachement particulier à certaines de ces caractéristiques, par exemple l’if de l’église, la chapelle de Saint-Jacob, etc. Cependant, la religiosité est aujourd’hui moins importante. Ce patrimoine religieux n’a pas autant de symbolique surtout auprès des plus jeunes ; ceux-ci ne considèrent plus de la même manière, par exemple, les croix de chemin. L’église paroissiale demeure malgré tout un symbole visuel très fort pour l’ensemble de la communauté.

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