Théorie mathématique de la lumière/2/Chap.05

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Georges Carré (2p. 65-95).

CHAPITRE V


THÉORIE DE LA RÉFLEXION. — RÉFLEXION VITREUSE

51. Pour étudier le cas où les rayons interférents font un angle de  degrés, il nous faut dire d’abord quelques mots sur la théorie de la réflexion et de la réfraction dans l’hypothèse de Maxwell :

Reprenons les équations de Maxwell sous la forme que leur a donnée Hertz.

(I)
(II)

Supposons que nous ayons deux milieux, possédant des pouvoirs inducteurs spécifiques différents et séparés par une surface, que nous supposerons réduite au plan des

Comme il est très peu probable que le passage d’un milieu à l’autre se fasse brusquement et qu’ils soient séparés par une surface purement géométrique, nous admettrons qu’il existe une couche de passage où varie très rapidement, mais cependant d’une manière continue.

52. Toutes les quantités seront finies ainsi que leurs dérivées prises par rapport à et mais nous ne pouvons dire qu’il en est de même de leurs dérivées par rapport à Voyons, par exemple, ce qui arrive pour Puisque varie très rapidement dans la couche de passage, il faut que prenne des valeurs très grandes, du même ordre de grandeur que l’inverse de l’épaisseur de cette couche de passage. Ces dérivées par rapport à peuvent donc devenir infinies.

53. Différencions les équations (II) respectivement par rapport à et ajoutons-les, il vient :

Nous avons le droit de supposer qu’à l’origine du temps

Alors l’équation ci-dessus se traduit par

(1)

En opérant de même sur le système (I) nous trouvons :

et en supposant qu’à l’origine du temps :

ceci entraîne :

(2)

54. Considérons maintenant la première équation du système (I) ; et sont des quantités finies ; il ne pourrait y avoir doute que pour Mais d’après l’équation elle-même, doit être nécessairement fini, puisqu’il est égal à

Par conséquent est continu dans la couche de passage.

La deuxième équation nous montre que est aussi continu et enfin l’équation (1) que est continu. Nous démontrons ainsi que les trois composantes de la force magnétique sont continues.

La première des équations (II) montre que est fini et par suite que est continu, la seconde que est fini et continu, donc les composantes tangentielles de la force électrique sont continues.

Mais nous ne pouvons en dire autant de la composante normale Car l’équation (2), dans laquelle les deux termes du premier membre sont finis nous apprend seulement que est fini, soit que est continu. Mais puisque est discontinu, l’est aussi.

55. Réflexion d’une onde plane. — Ces préliminaires posés, considérons une onde plane qui se réfléchisse et se réfracte sur le plan des et supposons que le plan d’incidence soit celui des Deux cas peuvent se présenter :

1o La force électrique est perpendiculaire au plan d’incidence ;

2o La force magnétique est perpendiculaire au plan d’incidence, la force électrique étant parallèle à ce plan.

56. Premier cas. — La force électrique est parallèle à donc :

pour le rayon incident.

Le plan de l’onde réfléchie est aussi perpendiculaire au plan d’incidence et doit faire le même angle avec la normale, mais du côté opposé. On aura pour le rayon réfléchi

est le plan de l’onde réfléchie.

Enfin pour le rayon réfracté :

Nous avons vu que devait être continu ; d’ailleurs par conséquent se réduit à qui doit être continu. De même se réduit à qui doit être aussi continu. Enfin

Désignons par la valeur de dans le premier milieu, prise sur la surface de séparation, par cette valeur dans le second milieu.

Puisque est continu, tout le long de la surface de séparation. On peut donc différencier par rapport à et à et écrire

et puisque doit être continu,

Égalons les valeurs de pour de chaque côté du plan de séparation, il vient :

soit pour en supprimant le facteur commun

Comme cette relation doit avoir lieu identiquement, quel que soit il faut que :

De même en égalant les valeurs de pour et supprimant le facteur exponentiel, commun aux deux membres, il vient :

Introduisons l’angle d’incidence ou l’angle que fait le plan de l’onde incidente avec le plan des (la surface de séparation).

Le plan de l’onde incidente a pour équation :

Les cosinus directeurs de la normale sont :

Par conséquent :

Pour l’onde réfractée, il suffit de changer en et en désignant par l’angle de réfraction que fait le plan de l’onde incidente avec le plan de l’onde réfractée.

D'où :

57. 2o Supposons maintenant que la force magnétique soit perpendiculaire au plan d’incidence, et la force électrique située dans ce plan.

Dans ces conditions on a :

Pour l’onde incidente :

Pour l’onde réfléchie :

Et pour l’onde réfractée :

en posant :

Par conséquent, dans le premier milieu :

et dans le second :

doit être continu ; de même

Donc pour deux points infiniment voisins l’un de l’autre, mais situés de part et d’autre de la surface de séparation, doit avoir même valeur, et il en est de même de Comme

et qu’ici :
il faut que :
soit continu.

Soit le pouvoir inducteur spécifique du premier milieu, celui du second ; on sait que :

Dans le premier milieu :

Dans le second :

Sur la surface de séparation et

En écrivant que a la même valeur dans les deux milieux pour et supprimant l’exponentielle qui est facteur commun, nous obtenons la condition

En écrivant de même que est continu, il vient :

De ces deux relations, nous déduirons :

En effet : des deux égalités

il résulte

Lorsque devient infini et devient nul.

Le rayon réfracté est alors perpendiculaire au rayon réfléchi ; la valeur correspondante de l’angle d’incidence s’appelle angle de polarisation complète ou angle de Brewster.

58. Réflexion totale. — Si le deuxième milieu est plus réfringent ou bien s’il est moins réfringent que le premier, mais que l’angle de réflexion totale ne soit pas atteint, est réel ; est aussi réel, et la différence de phase entre la vibration incidente et la vibration réfléchie est égale à ou à

Si l’angle limite est dépassé, devient une imaginaire pure ; et sont imaginaires conjugués, leur rapport a un module égal à l’unité.

La lumière réfléchie a même intensité que la lumière incidente ; seulement, comme le rapport est imaginaire, il y a une différence de phase entre les deux vibrations.

Cette différence n’a pas la même valeur suivant que la force électrique est perpendiculaire ou parallèle au plan d’incidence. Aussi, quand le plan de polarisation n’est pas perpendiculaire au plan d’incidence, le rayon réfléchi est polarisé elliptiquement.

L’onde réfractée devient imaginaire. En posant

on a :
et pour cette onde réfractée
soit, en supposant réel,

Comme est en général très grand, le facteur devient très petit dès qu’on s’écarte un peu de la surface ; aussi n’observe-t-on pas de lumière réfractée dans ces conditions.

59. Vérifications expérimentales. — Nous sommes arrivés à cette conclusion que :

1o Quand la force électrique est perpendiculaire au plan d’incidence, le rapport de l’intensité de la lumière réfléchie à l’intensité de la lumière incidente est égal à

2o Quand la force électrique est située dans le plan d’incidence, ce rapport est égal à

Ces conclusions sont susceptibles de deux genres de vérifications : les unes empruntées à l’observation des phénomènes optiques, les autres à l’observation des oscillations hertziennes.

Si nos conclusions sont exactes, les valeurs de l’intensité de la lumière réfléchie trouvées par l’expérience doivent coïncider avec les valeurs déduites de l’une ou de l’autre des formules ci-dessus, suivant que la lumière incidente est polarisée perpendiculairement ou parallèlement au plan d’incidence : c’est ce qui a lieu.

60. L’expérience prouve que le rapport de la lumière réfléchie à la lumière incidente est égal à

si la lumière est polarisée dans le plan d’incidence ; et à

si le plan de polarisation est perpendiculaire au plan d’incidence.

Il en résulte que la force électrique doit être perpendiculaire au plan de polarisation.

Mais, si nous ne possédions que cette vérification, la valeur de cette conclusion serait subordonnée à celle des hypothèses que nous avons faites.

61. L’étude des oscillations hertziennes fournit une confirmation plus rigoureuse. — Dans ces oscillations on connaît a priori la direction des vibrations magnétiques. On peut donc réaliser les expériences dans des conditions déterminées : produire la réflexion des ondes sur la surface d’un diélectrique, en plaçant la force électrique d’abord perpendiculaire, puis parallèle au plan d’incidence, et faire varier l’incidence. Dans le second cas, on doit observer une certaine valeur de l’incidence pour laquelle il n’y aura plus réflexion, ce qui ne doit pas arriver dans le premier cas.

62. Les expériences faites sur un mur de mètre d’épaisseur et sur un bloc de soufre ont réussi mieux même qu’on n’aurait pu s’y attendre. Il semble à première vue qu’il aurait dû se produire une réflexion sur la seconde face du mur : ce mur de mètre est en effet une lame mince vis-à-vis des oscillations électriques, puisque son épaisseur n’est que de quelques longueurs d’onde.

Mais il est facile de voir que, si un rayon tombe sur la première face de la lame, de façon à ce qu’il n’y ait pas réflexion, il ne s’en produira pas davantage sur la seconde face.

Il suffit en effet de faire la figure, et on s’aperçoit immédiatement que le rayon réfléchi sur la seconde face serait aussi perpendiculaire au rayon réfracté correspondant, et que par suite la réflexion n’a pas lieu (fig. 7).

63. Cette extinction du rayon réfléchi est très nette : mais
Fig. 7.
la vérification des formules de rapport est moins satisfaisante. Il semble qu’il devrait y avoir des minima pour certaines épaisseurs de la lame mince ; on n’a rien observé de tel : probablement à cause de l’amortissement considérable que présentaient les excitateurs et les résonateurs, d’où il résultait une perte d’intensité qui ne permettait plus aux ondes d’interférer complètement.

64. Application aux expériences de Wiener. — Revenons maintenant aux expériences de Wiener, dans lesquelles le rayon incident et le rayon réfléchi sont normaux au miroir. Comme le plan d’incidence est indéterminé, nous pouvons le supposer perpendiculaire à la force électrique et appliquer notre première formule. Comme les angles tendent vers nous substituerons leur rapport à celui de leurs sinus :

Donc en supposant est négatif.

Pour la force magnétique :

En remplaçant le rapport des tangentes par celui des arcs, est positif.

Par conséquent, la force électrique a dans le rayon réfléchi le sens contraire à celui qu’elle a dans le rayon incident. La force magnétique a le même sens dans les deux.

Les deux rayons interfèrent, et la photographie indique un minimum sur la surface même de réflexion. Or les deux forces électriques incidente et réfléchie se retranchent, puisqu’elles sont de sens contraire ; tandis que les deux forces magnétiques sont de même sens et s’ajoutent.

L’intensité photographique est donc minimum en même temps que la force électrique. Par conséquent, elle dépend, non de la force magnétique, mais de la force électrique, non de l’énergie électro-magnétique, mais de l’énergie électrostatique.

65. Si nous adoptons la théorie de Fresnel, l’intensité est mesurée par l’énergie cinétique moyenne ; si nous adoptons l’hypothèse de Neumann, l’intensité est mesurée par l’énergie potentielle moyenne.

Nous avons vu en effet au no 17 que dans l’hypothèse de Fresnel l’énergie électrostatique est proportionnelle à l’énergie cinétique, et dans l’hypothèse de Neumann à l’énergie potentielle.

Ces deuxièmes expériences de Wiener confirment donc pleinement les premières, sans d’ailleurs rien leur ajouter.

66. Anneaux colorés. — Considérons une lame mince comprise entre deux plans parallèles. Un rayon tombe sur la première surface, il se divise en un rayon réfléchi et un rayon réfracté.

Ce rayon réfracté arrive à la seconde surface, subit une division analogue, et ainsi de suite. Dans chacun des deux milieux on a une série de rayons parallèles ; dans le milieu supérieur ils proviennent d’un nombre impair de réflexions et de deux réfractions ; dans le milieu inférieur, ils proviennent d’un nombre pair de réflexions et de deux réfractions (fig. 8).


Fig. 8.

Généralement on calcule l’intensité de ces rayons et leur différence de phase, puis on les compose en profitant de ce qu’ils forment une progression géométrique.

Il est plus court de procéder de la manière suivante :

Supposons que la lumière soit polarisée dans le plan d’incidence, et que la force électrique soit perpendiculaire à ce plan.

Nous aurons dans le premier milieu :

Le terme se rapporte au rayon incident, le second à l’ensemble des rayons réfléchis

Dans la lame mince

Le premier terme se rapporte au rayon non réfléchi et à ceux qui lui sont parallèles.

Le second, au rayon une fois réfléchi dans la lame et à ceux qui lui sont parallèles.

Enfin dans le troisième milieu

pour l’ensemble des rayons qui ont traverse la lame.

Dans chacun des milieux, on a respectivement

1er milieu
2e »
3e »

et doivent être continus sur les deux surfaces.

Or sur la première surface

et

En supprimant l’exponentielle en facteur, il vient

(1)
(2)

Sur la seconde surface

Si est l’épaisseur de la lame, il faut faire dans ces relations, et il vient, après simplification

(3)
(4) .

Les équations (1), (2), (3), (4) permettent de calculer lorsqu’on connaît

L’intensité de la lumière réfléchie est proportionnelle au carré du module de la phase est égale à l’argument de

Dans les cas où la lumière serait polarisée perpendiculairement au plan d’incidence, il faudrait remplacer dans les formules par et par

67. Supposons que le milieu intermédiaire soit moins réfringent que les deux autres, et que l’angle limite soit dépassé. Alors est une imaginaire pure et est réel.

Si la lame est suffisamment mince, ne sera pas nul, aura un module différent de et le rayon réfracté pourra devenir observable.

68. Pour réaliser ces conditions, on accole par leurs bases deux prismes à réflexion totale de manière à laisser entre eux une lame d’air très mince (fig. 9). La lumière réfléchie n’a plus une intensité égale à celle de la lumière incidente, et on
Fig. 9.
observe des anneaux.

Ces anneaux n’ont pas de colorations aussi vives que les anneaux ordinaires, dans lesquels certaines couleurs sont complètement détruites par interférence. Cela ne peut pas arriver dans le cas de la réflexion totale.

Supposons en effet que dans l’expérience soit nul. Les relations deviennent

d’où :
et enfin :
ce qui exigerait :

Ceci ne peut avoir lieu que si est réel et égal à

69. Réflexion métallique. — L’expérience montre que les métaux exercent sur les courants alternatifs une action réfléchissante de caractère variable avec la durée des alternances.

S’il s’agit de courants alternatifs à période très longue à de seconde les divers métaux se comportent de façons fort différentes et leur conductibilité spécifique joue un grand rôle dans le phénomène de la réflexion. Il en est de même pour les oscillations extrêmement rapides comme les vibrations lumineuses, dont la période est voisine de , ou seconde.

Au contraire, pour des oscillations ayant une durée de période intermédiaire, comme c’est le cas des oscillations hertziennes ( à seconde), tous les métaux se comportent de la même manière, comme s’ils étaient tous des conducteurs parfaits.

70. Comment rendre compte de ces particularités par la théorie ?

Voici comment Maxwell et Hertz se représentent la manière dont l’électricité se comporte dans les métaux.

Conservons les équations qui ont trait aux diélectriques.

est le courant total résultant du courant de déplacement et du courant de conduction :

étant les composantes du déplacement, la conductibilité, les composantes de la force électrique.

Nous poserons en outre :

sera le pouvoir inducteur spécifique du métal, par définition. Cette quantité peut être nulle, et en tout cas elle serait très difficile à mesurer ; mais, pour plus de généralité, nous l’introduirons dans le calcul. Les formules deviennent alors :

et deux autres obtenues par symétrie. Ces équations sont de la même forme que les équations

relatives aux diélectriques. Seulement elles renferment en plus un terme dépendant de

71. Supposons qu’une onde incidente tombe sur le métal. seront de la forme :

Or, nous avons vu que nous pouvions effectuer tous les calculs sur l’expression complète, et à la fin prendre seulement les parties réelles : nous profiterons encore ici de cette simplification.

Il vient alors

ou :

Remplaçons par cette valeur :

Sous cette forme, nous retrouvons l’équation relative aux diélectriques à cela près que le coefficient réel de cette dernière est remplacé par un coefficient imaginaire Nous n’avons donc qu’à reprendre tous les calculs faits dans le cas de la réflexion vitreuse.

devront être continus ainsi que leurs dérivés par rapport à mais sera discontinu.

Pour l’onde incidente

Pour l’onde réfléchie

désignant l’angle d’incidence, le pouvoir inducteur spécifique du milieu supérieur. On devra avoir :

et

d’après les équations du mouvement.

Dans le métal

Par analogie avec ce que nous avons fait dans le cas de la réflexion vitreuse, nous poserons :

Mais dans le cas actuel l’angle est imaginaire puisque est imaginaire. Nous aurons aussi

Et si nous posons

72. Il résulte de la présence du facteur exponentiel est très grand, que devient très petit dès que atteint une valeur un peu notable. Il n’y aura donc plus de lumière sensible à une distance très faible du plan de séparation.

Le pouvoir inducteur des diélectriques est proportionnel au carré de leur indice de réfraction : nous conviendrons de dire par analogie que le rapport

représente le carré de l’indice de réfraction du métal

indice qui est forcement imaginaire. Alors

Le reste du calcul s’achève comme pour la réflexion vitreuse.

73. Supposons d’abord que la force électrique soit perpendiculaire au plan d’incidence, c’est-à-dire que le plan de polarisation coïncide avec le plan d’incidence

Puisque est imaginaire, le rapport l’est aussi. Le carré du module de ce rapport donne le pouvoir réflecteur du métal. Son argument donne la perte de phase.

Si la force magnétique est perpendiculaire au plan d’incidence, c’est-à-dire si le plan de polarisation est perpendiculaire au plan d’incidence, on trouvera

Le rapport est encore imaginaire : le carré de son module et son argument ont la même signification physique que précédemment.

74. Ces formules ont été vérifiées par l’expérience d’une façon assez satisfaisante.

Cette vérification suppose, bien entendu, que pour chaque rayon homogène de couleur déterminée on donne aux constantes et des valeurs convenables qu’il faut changer quand la couleur change.

La manière dont nous venons de présenter les phénomènes de la réflexion métallique influe seulement sur la réflexion des vibrations très lente ou très rapide, mais reste indifférente quand il s’agit des oscillations hertziennes, dont la durée est intermédiaire.

C’est de cette circonstance que nous allons essayer de rendre compte maintenant.

75. Nous avons trouvé que la force électrique en un point du métal était proportionnelle à un certain facteur exponentiel étant en général très grand, la vibration ne pénètre qu’à une profondeur très faible dans le métal ; cette profondeur est du même ordre de grandeur que d’autant plus petit par conséquent que est plus grand.

Divisons membre à membre les deux relations

et
nous obtenons

La partie réelle du second membre est en général finie.

En ce qui concerne la partie imaginaire :

CGS[1]
(pour le cuivre)

Le coefficient de est donc voisin de :

pour les oscillations les plus rapides ; pour des oscillations plus lentes, cette valeur serait plus grande.

Le coefficient a donc toujours une valeur très grande, il faut donc que et aient tous les deux une très grande valeur par rapport à et à D’autre part, puisque la partie réelle est finie, il faut que soit du même ordre que sera très voisin de et on pourra prendre approximativement :

ou :

en remarquant que est donc proportionnel à et par conséquent la profondeur à laquelle pénètre la vibration, qui est inversement proportionnelle à est proportionnelle à comme est en raison inverse de la longueur d’onde, la profondeur limite est en définitive proportionnelle à la racine carrée de la longueur d’onde.

Pour les oscillations très lentes, le courant pénètre à une profondeur finie, comparable aux dimensions du conducteur. La conductibilité du métal aura une influence.

Pour les oscillations hertziennes, la profondeur est très petite en valeur absolue, et très petite par rapport à la longueur d’onde : la nature du métal n’intervient plus.

Pour les oscillations très rapides, la profondeur devient comparable à la longueur d’onde, et la nature du métal reprend une influence.

76. Cette théorie due à M. Brillouin (Bulletin des Sciences mathématiques, 1891) n’est pas suffisante pour rendre complètement compte des faits.

En effet, les expériences faites sur les métaux peuvent donner les valeurs de et de Pour les rayons violets tombant sur l’argent, on a trouvé ;

Puisque nous avons pour l’argent (et d’ailleurs pour la plupart des métaux), doit être négatif : c’est là une très grande difficulté.

est déterminé par l’équation

Les quantités du second membre sont connues expérimentalement. Pour les rayons violets et l’argent par exemple :

Ou environ Cette valeur est environ trois cents fois plus faible que celle donnée par les mesures ordinaires de résistance, qui est voisine de

Les formules que nous avons adoptées ne représentent donc pas les faits. À la vérité, nous le savions déjà puisque dans le cas même des diélectriques transparents, si la formule

était exacte, il n’y aurait pas de dispersion. De plus, la valeur de mesurée électrostatiquement diffère souvent beaucoup du carré de l’indice de réfraction optique. Est-ce là encore un résultat de la dispersion ? Bien des personnes inclinent aujourd’hui à le penser ; en tout cas, il serait curieux de vérifier si, pour les corps qui présentent le plus grand écart, le terme de Briot est plus grand que pour les autres.

Mais, si nos formules sont incomplètes, comment se fait-il qu’elles rendent compte des lois de la réflexion quand on se borne à une lumière homogène et à la condition de changer les constantes quand on passe à une lumière homogène de couleur différente ?

Il est aisé de s’en rendre compte. Supposons qu’au lieu des formules :

ou
nous ayons adopté les suivantes

En remarquant que

nous aurions pu écrire :
avec

Nous retomberions alors sur nos formules primitives avec cette différence que le coefficient de dépendrait de

De même dans le cas de la réflexion métallique nous aurions pu adopter les formules :

d’où nous aurions déduit :

équation de même forme, mais avec des coefficients imaginaires.

Les calculs seraient les mêmes qu’avec les formules primitives, car, si l’on opère sur une lumière homogène, est une constante donnée, et le coefficient de est constant.

Il est probable toutefois que la théorie définitive de la dispersion est notablement plus compliquée.

77. Cas particulier. Oscillations hertziennes. — Dans le cas particulier des oscillations hertziennes le terme

est très grand, il est égal approximativement à :

En admettant que sera donc très grand en valeur absolue, et comme

sera très petit en valeur absolue.

78. Supposons la force électrique perpendiculaire au plan d’incidence.

est sensiblement nul ; alors

La force électrique réfléchie a même amplitude que la force électrique incidente ; mais elles ont une différence de phase d’une demi-période ; sur le plan de réflexion elles sont égales et de signes contraires : leur résultante est nulle.

79. Supposons la force magnétique perpendiculaire au plan d’incidence.

La force magnétique incidente et la force magnétique réfléchie ont même amplitude et même phase ; sur le plan de réflexion elles s’ajoutent.


Fig. 10.

Les forces électriques réfléchie et incidente ont aussi même amplitude et même phase, puisque dans le cas d’une onde plane la force électrique est proportionnelle à la racine carrée de l’intensité et, par conséquent, à la force magnétique, et qu’il y a entre ces deux forces une différence de phase d’un

quart de période. Mais les forces électriques n’ont pas la

même direction : elles font des angles égaux avec la normale au plan de réflexion (fig. 10).

Si nous les projetons sur cette normale, les projections s’ajouteront, mais leurs projections sur le plan de réflexion se détruisent. Par conséquent la composante tangentielle de la force électrique est nulle, et cette force est normale au plan.

À la surface d’un conducteur la force électrique est donc normale, comme cela aurait lieu pour un conducteur parfait.


  1. Je fais le calcul comme si la valeur de qu’il convient de prendre pour des oscillations rapides était la même que pour des oscillations lentes. Nous verrons plus loin qu’il n’en est pas ainsi et que cette circonstance modifie profondément les résultats.