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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/290

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sion de beaucoup de ses éléments, mais dans celui d’une poussée de croissance au dehors, produisant toujours de nouveaux [255] rameaux, s’assimilant toujours plus de substance religieuse, et l’élaborant conformément à sa nature particulière à elle. Elles ne se sont donc pas développées et constituées conformément à ce principe faux ; celui-ci ne fait pas partie intégrante de leur nature ; c’est une corruption qui s’est insinuée en elles venant du dehors, il leur est tout aussi contraire qu’il l’est à l’esprit de la religion en soi, et le rapport entre lui et elles n’est qu’un état de guerre perpétuelle. Ces faits sont de nature à prouver, plutôt qu’à infirmer, qu’elles sont, elles, ces manifestations individuelles de la religion que nous cherchons.

Toutes les différences, au sein de la religion en soi, sur lesquelles j’ai jusqu’ici attiré de temps à autre votre attention, suffisent tout aussi peu pour produire une forme de religion absolument déterminée et constituant un individu. Les trois façons si souvent mentionnées de contempler intuitivement l’Univers, que ce soit comme chaos, comme système, ou dans sa multiplicité élémentaire[1], sont bien éloignées de constituer tout autant de religions distinctes et déterminées. Vous n’ignorez pas que, quand on divise un concept autant qu’on veut et jusqu’à l’infini, on n’arrive jamais par là à des individus, mais toujours seulement à des concepts moins généraux contenus dans les premiers, à des espèces et des subdivisions de concepts. Ces dernières peuvent à leur tour comprendre une masse [256] d’individus très différents les uns des autres. Mais pour trouver le caractère de ces êtres particuliers eux-mêmes, il faut sortir du cadre du concept général et de ses caractères distinctifs. Les trois différences au sein de la religion rappelées plus haut ne sont en fait qu’une division habituelle, et qui revient partout, du concept de l’intuition[2]. Ce sont par conséquent des espèces, non des formés déterminées de la religion, et le besoin qui nous fait chercher ces dernières ne serait pas non plus et pas

  1. Cf. p. 128, 187, 240, 258-9.
  2. B explique : conformément au schéma universellement répandu de unité, pluralité, totalité, cf. p. 126-30.