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Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/32

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eux tous autour de l’idée d’une conciliation, d’une fusion nécessaire, où tout au moins très désirable, de l’infini avec le fini, sous toutes ses formes. Elle reste en général très confuse. Ici, elle l’est extrêmement. Nous en trouverons plus loin une expression plus intéressante.

Il en vient enfin à la religion proprement dite. Il parlera d’elle telle qu’il la connaît par son expérience personnelle : cette expérience personnelle que chaque croyant doit en faire, et qui, c’est l’objet même de ces Discours de le montrer, est le vrai principe de toute religion vraie.

Il commence par un aveu qu’il fait en passant, dans une proposition incidente, sans paraître se douter de sa gravité, p. 15. « La religion a été le sein maternel dans l’obscurité sainte duquel ma jeune vie fut nourrie… elle m’a aidé quand, je commençai à scruter la foi paternelle… elle m’est restée quand Dieu et l’immortalité de l’âme disparurent de ma vision, écartés par le doute. » Il n’a pas l’air, en parlant ainsi, de se rendre compte que Dieu et l’immortalité de l’âme sont deux articles de la foi chrétienne si essentiels que, ces croyances éliminées, et avec elles celle en la divinité surnaturelle du Fils de l’homme et, par suite, en sa mission rédemptrice, rien ne subsiste de ce qui fait la substance du protestantisme aussi bien que du catholicisme positifs. Il comprendra en 1806 la nécessité de corriger l’expression qui, dans sa netteté tranchée, devait effaroucher tous les croyants. Il maintient courageusement cette déclaration, mais précise alors : le Dieu et l’immortalité « de l’âge enfantin », indiquant par là qu’il a conservé, ou retrouvé, de ces croyances, ce qu’il a pu en accorder avec les idées de son âge mûr. Dans ses Explications de 1821, no 2, il déclarera qu’il n’a jamais été un incrédule ou un athée, et, par ces mots de 1799, à entendu marquer seulement la crise par laquelle tout croyant doit passer, dans le légitime effort qui s’impose à lui pour purifier sa foi d’un anthropomorphisme indigne d’elle. Nous connaissons, nous, la gravité de la crise qu’il avait en effet traversée dès sa dix-neuvième année, et sommes moins surpris que sa sincérité lui ait dicté en 1799 une déclaration d’incrédulité aussi crue. Il s’expliquera nettement sur ces deux croyances dans le second discours, p. 123-133.

Il se tourne à présent vers ceux qu’il se propose de ramener à la religion. Il ne s’adressera pas aux Anglais, jugés par