À l’heure des mains jointes (1906)/Où donc irai-je ?
Pour les autres éditions de ce texte, voir Où donc irai-je ?….
OÙ DONC IRAI-JE ?…
Nul flot ne bouge, nul rameau ne se balance…
Le gris se fait plus gris, le noir se fait plus noir,
Et le chant des oiseaux ne vaut pas le silence…
Où donc irai-je, avec mon cœur, par ce beau soir ?
Dans le ciel du couchant triomphal, les nuages
Roulent, lourds et dorés comme des chariots…
Je suis lasse des jours, des voix et des visages
Et des pleurs refoulés et des muets sanglots…
Toi qui ressembles aux royales amoureuses,
Revis auprès de moi les bonheurs effacés…
À l’avenir chargé de ses roses fiévreuses
Je préfère la pourpre et l’or des temps passés…
Soyons lentes, parmi les choses trop hâtives…
Il ne faut rien chercher… Il ne faut rien vouloir…
Allons en pleine mer, sans aborder aux rives…
Me suivras-tu, vers l’infini, par ce beau soir ?…