À une femme (Mendès)

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PhilomélaJ. Hetzel, libraire-éditeur (p. 145-146).

À UNE FEMME



Ô femme, ô sombre cœur dans le mal égaré,
Ton front n’est point pâli comme le front des veuves ;
Ta douleur a le calme imposant des grands fleuves,
Et tu ne pleurais pas le jour où j’ai pleuré.


Ton vaste orgueil s’étale au-dessus des épreuves
Comme au sommet des monts un beau lac azuré ;
Tu portes, souriante et le pas mesuré,
Tes nouveaux désespoirs comme des robes neuves.

Rien ne peut entamer ton cœur de diamant !
Dieu lit, dans le serein éclat de ta prunelle,
L’irrémissible vœu de l’endurcissement.

Moi, je te suis de loin vers la nuit éternelle,
Et, perdu dans l’horreur de ton rayonnement,
Je m’abîme en ta chute, ô grande criminelle !