Épaves (Prudhomme)/Deuil de Cœur

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ÉpavesAlphonse Lemerre. (p. 46-47).


DEUIL DE CŒUR


Quand je saurai qu’on vous marie,
Que vous n’avez pour vos amis
Qu’un entretien sans rêverie,
Où le soupir n’est plus permis ;

Qu’après un oui réglé d’avance
Il ne nous restera de vous
Ni la fraîcheur de l’ignorance
Ni votre petit nom si doux ;


Qu’il faudra vous dire : Madame,
Tandis que le maître et seigneur
Vous dira sans façons : Ma femme,
Comme un Orgon de belle humeur ;

Mû de pitié plus que d’envie,
Sur votre tombeau nuptial
Je prendrai pour toute ma vie
Le deuil de mon jeune idéal.