Épitres (Horace, Panckoucke)/I/3

La bibliothèque libre.
Épitres
Traduction par Collectif dont C.-L.-F. Panckoucke.
Texte établi par Charles-Louis-Fleury PanckouckeC.L.F. Panckoucke (2p. 225-227).

ÉPITRE III. À JULIUS FLORUS .

Florus, je suis impatient de savoir en quelles contrées fait la guerre Claudius, le beau-fils d'Auguste. Est-ce la Thrace ? est-ce l'Hèbre enchaîné par une barrière de glaces ? est-ce cette mer qui flotte entre deux villes prêtes à s'unir, ou les riches campagnes et les coteaux de l'Asie qui vous retiennent ?

Et votre cohorte littéraire, quels monuments élève-t-elle ? c'est aussi chose qui m'occupe. Lequel s'est chargé d'écrire les hauts faits d'Auguste ? lequel, de transmettre aux âges les plus reculés nos guerres et nos traités ?

Et Titius, qui bientôt va remplir Rome de sa renommée, qui n'a pas craint de puiser à la source de Pindare, dédaignant, dans son audace, les lacs et les ruisseaux accessibles au vulgaire, comment se porte-t-il ? se souvient-il encore de nous ? s'efforce-t-il, sous les auspices des Muses, de façonner la lyre latine aux accords du chantre thébain ? ou bien se livre-t-il, en vers pompeux, à de tragiques fureurs ?

Que fait aussi notre Celsus, Celsus, que l'on avertissait, et que l'on doit, cent fois avertir de fouiller dans ses propres richesses, et de ne point toucher aux écrits divers qu'Apollon Palatinus a reçus dans son temple; de peur que si les oiseaux en troupe venaient un jour reprendre leurs plumes, la pauvre corneille, dépouillée de ses couleurs d'emprunt, ne devienne un objet de risée ?

Et toi-même qu'as-tu entrepris ? abeille légère, autour de quelle fleur voltiges-tu ? Ton génie n'est point vulgaire, n'est point inculte, n'est point abâtardi. Soit que tu aiguises les traits d'un plaidoyer, soit que tu te disposes à interpréter nos lois civiles, soit que tu composes d'aimables chants, c'est à toi le premier que sera décerné le lierre, prix de la victoire. Ah ! si tu pouvais te soustraire à l'influence glaciale de tes passions, tu suivrais la céleste sagesse partout où elle te guiderait. Petits et grands, que ce soit le but de nos travaux et de nos études, si nous voulons vivre chers à la patrie et à nous-mêmes.

Il faut aussi que tu me répondes si tu as pour Munatius toute l'affection que tu lui dois. Est-ce vainement qu'une réconciliation douteuse vous a rapprochés ? et vous êtes-vous de nouveau séparés ? Mais, soit que la chaleur de votre sang, soit que votre inexpérience du monde entretienne les ressentiments de vos cœurs inflexibles, quelque part que vous viviez, vous qui n'êtes pas faits pour rompre les liens de la fraternité, je nourris pour votre retour une génisse que j'ai promise aux dieux.