Épodes (Horace, Leconte de Lisle)/1
Traduction Leconte de Lisle, 1873
u iras, ami, sur les nefs Liburniennes,
au milieu des hautes citadelles marines, prêt à partager tous les périls
de Cæsar, ô Mæcenas ! Qu’adviendra-t-il de moi, à qui la vie est chère
si tu vis, et lourde si tu meurs ? Poursuivrai-je,
comme tu l’ordonnes, un repos qui ne m’est doux
qu’avec toi ? ou faut-il prendre part à cette guerre avec le courage qui convient aux hommes braves ?
Je le ferai ; et, sur les cimes des Alpes, sur le Caucasus inhospitalier, et jusqu’au dernier confin de
l’Occident, je te suivrai d’un cœur ferme. Tu demanderas comment je t’aiderai, étant faible et pacifique ?
Avec toi j’aurai une crainte moins grande que celle
qu’on éprouve pour les absents. L’oiseau, assidu
près de ses petits sans plume, craint davantage
pour eux les atteintes des serpents s’il les a quittés,
bien qu’il leur soit d’aussi peu de secours étant
présent. Je ferai volontiers cette guerre et toutes
les autres dans l’espérance de te plaire, non pour
que mes charrues soient attelées de nombreux taureaux, pour que mon troupeau paisse, avant le
Signe brûlant, des pâturages Calabriens à ceux des
Lucaniens, ou pour que ma blanche villa touche
aux murs Circæens du haut Tusculum. Ta bienveillance m’a plus qu’enrichi. Je n’amasserai pas
pour enfouir mon trésor en terre comme l’avare
Chrémès, ou pour le dissiper comme un jeune
débauché.