Œuvres complètes de Béranger/Le Pigeon Messager
Pour les autres éditions de ce texte, voir Le Pigeon Messager.
LE PIGEON MESSAGER[1]
L’aï brillait, et ma jeune maîtresse
Chantait les dieux dans la Grèce oubliés.
Nous comparions notre France à la Grèce,
Quand un pigeon vient s’abattre à nos pieds. (bis.)
Nœris découvre un billet sous son aile :
Il le portait vers des foyers chéris. (bis.)
Bois dans ma coupe, ô messager fidèle ! |
bis. |
Il est tombé, las d’un trop long voyage ;
Rendons-lui vite et force et liberté.
D’un trafiquant remplit-il le message ?
Va-t-il d’amour parler à la beauté ?
Peut-être il porte au nid qui le rappelle
Les derniers vœux d’infortunés proscrits.
Bois dans ma coupe, ô messager fidèle !
Et dors en paix sur le sein de Nœris.
Mais du billet quelques mots me font croire
Qu’il est en France à des Grecs apporté.
Il vient d’Athène ; il doit parler de gloire :
Lisons-le donc par droit de parenté.
Athène est libre ! amis ! quelle nouvelle !
Que de lauriers tout à coup refleuris !
Bois dans ma coupe, ô messager fidèle !
Et dors en paix sur le sein de Nœris.
Athène est libre ! ah ! buvons à la Grèce :
Nœris, voici de nouveaux demi-dieux.
L’Europe en vain, tremblante de vieillesse,
Déshéritait ces aînés glorieux.
Ils sont vainqueurs ; Athènes, toujours belle,
N’est plus vouée au culte des débris.
Bois dans ma coupe, ô messager fidèle !
Et dors en paix sur le sein de Nœris.
Athène est libre ! ô muse des Pindares !
Reprends ton sceptre, et ta lyre, et ta voix.
Athène est libre en dépit des barbares ;
Athène est libre en dépit de nos rois.
Que l’univers, toujours instruit par elle,
Retrouve encore Athènes dans Paris !
Bois dans ma coupe, ô messager fidèle !
Et dors en paix sur le sein de Nœris.
Beau voyageur, au pays des Hellènes
Repose-toi, puis vole à tes amours ;
Vole, et, bientôt reporté dans Athènes,
Reviens braver et tyrans et vautours.
À tant de rois dont le trône chancelle,
D’un peuple libre apporte encor les cris.
Bois dans ma coupe, ô messager fidèle !
Et dors en paix sur le sein de Nœris.
Air noté dans Musique des chansons de Béranger :
↑ Haut
- ↑ Tout le monde connaît l’usage que quelques peuples font des pigeons pour porter les lettres pressées. On les emporte loin de leur séjour habituel, et ils traversent pour y revenir les plus grandes distances, avec une rapidité qui paraît incroyable.