Jeté sur cette boule,
Laid, chétif, et souffrant ;
Étouffé dans la foule,
Faute d’être assez grand ;
Une plainte touchante
De ma bouche sortit ;
Le bon Dieu me dit : Chante,
Chante, pauvre petit ! (bis.)
Le char de l’opulence
M’éclabousse en passant ;
J’éprouve l’insolence
Du riche et du puissant ;
De leur morgue tranchante
Rien ne nous garantit.
Le bon Dieu me dit : Chante,
Chante, pauvre petit !
D’une vie incertaine
Ayant eu de l’effroi,
Je rampe sous la chaîne
Du plus modique emploi.
La liberté m’enchante,
Mais j’ai grand appétit.
Le bon Dieu me dit : Chante,
Chante, pauvre petit !
L’Amour, dans ma détresse,
Daigne me consoler ;
Mais avec la jeunesse
Je le vois s’envoler.
Près de beauté touchante
Mon cœur en vain pâtit.
Le bon Dieu me dit : Chante,
Chante, pauvre petit !
Chanter, ou je m’abuse,
Est ma tâche ici-bas.
Tous ceux qu’ainsi j’amuse
Ne m’aimeront-ils pas ?
Quand un cercle m’enchante,
Quand le vin divertit,
Le bon Dieu me dit : Chante,
Chante, pauvre petit !