Œuvres complètes de Buffon, éd. Lanessan/Histoire naturelle des minéraux/Rouille de fer et ocre

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CONCRÉTIONS DU FER
ROUILLE DE FER ET OCRE

La rouille de fer et l’ocre[NdÉ 1] sont les plus simples et les premières décompositions du fer par l’impression des éléments humides ; les eaux chargées de parties ferrugineuses réduites en rouille laissent déposer cette matière en sédiment dans les cavités de la terre où elle prend plus ou moins de consistance, sans jamais acquérir un grand degré de dureté ; elle y conserve aussi sa couleur plus ou moins jaune, qui ne s’altère ni ne change que par une seconde décomposition, soit par l’impression des éléments humides ou par celle du feu : les ocres brunes auxquelles on donne le nom de terre d’ombre, et l’ocre légère et noire, dont on se sert à la Chine pour écrire et dessiner, sont des décompositions ultérieures de la rouille du fer très atténuées, et dénuées de presque toutes ses qualités métalliques. On peut néanmoins leur rendre la vertu magnétique en leur faisant subir l’action du feu.

Toutes les ocres brunes, noires, jaunes ou rouges, fines ou grossières, légères ou pesantes, et plus ou moins concrètes, sont aisées à diviser et à réduire en poudre : on en connaît plusieurs espèces, tant pour la couleur que pour la consistance. M. Romé de Lisle les a toutes observées et très bien indiquées[1] ; au reste, nous ne séparerons pas des ocres les mines de fer limoneuses ou terreuses qui ne sont pas en grains ; car ces mines ne sont en effet que des ocres ou rouilles de fer plus ou moins mêlées de terre limoneuse. Et je dois me dispenser de parler ici des mines de fer en grains, dont j’ai expliqué la formation à l’article de la Terre végétale et du Fer[2].


Notes de Buffon
  1. La « rouille de fer » est un oxyde de fer. L’ocre est un oxyde impur du même métal.
Notes de l’éditeur
  1. On distingue dans les ocres : 1o l’ocre martiale jaune qui se précipite journellement des eaux martiales chaudes ou froides, vitrioliques ou acidulés ; 2o l’ocre martiale rouge qui semble devoir au feu sa couleur, puisqu’il suffit d’exposer au feu l’ocre martiale jaune pour lui faire prendre une très belle couleur rouge ; 3o l’ocre martiale noire, ou éthiops martial natif, qui n’est autre chose qu’une chaux de fer imparfaite ; on la trouve soit dans la vase des marais, soit à la surface des mines de fer spathiques en décomposition : 4o enfin, l’ocre martiale bleue qui porte aussi le nom de bleu de Prusse natif, quoiqu’elle diffère à plusieurs égards du bleu de Prusse artificiel : cette ocre se trouve quelquefois dans les tourbières, et sa couleur bleue peut provenir de l’alcali des substances végétales dont la tourbe est composée.

    Toutes ces ocres martiales, sans en excepter la dernière, se trouvent à Rio, dans l’île d’Elbe, aux environs de la montagne où l’on exploite, à ciel ouvert, la mine de fer grise à facettes brillantes, dont cette montagne est presque en entier composée. Cristallographie, par M. Romé de Lisle, t. III, p. 295.

  2. Voyez le second et le troisième volumes.